Lauréate du Concours
Messiaen 2007, Marie Vermeulin est à 29 ans une rayonnante musicienne douée d’une
riche personnalité. Passionnée de musique de son temps, elle excelle autant
dans Messiaen que dans Boulez, comme j’ai pu le constater à La Grave en 2010
durant le Festival Messiaen au Pays de la Meije. Bien qu’elle n’ait personnellement
connu ni Olivier Messiaen ni son épouse, Yvonne Loriod, Marie Vermeulin
entretient une intimité musicale singulière avec l’œuvre du compositeur qu’elle
a travaillée au Conservatoire de Paris avec l’un des plus proches disciples du
Maître, le pianiste Roger Muraro, tout en se perfectionnant à Florence auprès
de Lazar Berman, éminent lisztien.
Après deux premiers disques consacrés à la musique
de chambre de Messiaen, l’un de mélodies, avec Nathalie Manfrino, l’autre de
violon et piano, avec Daniel Hope (1), Marie Vermeulin présente son premier enregistrement
soliste. C’est en la petite église à l’acoustique somptueuse de clarté et de
présence de La Grave, au pied du sommet de La Meije, qu’elle a choisi de le
réaliser. Au sein de l’impressionnant catalogue pianistique de Messiaen, elle a
sélectionné des œuvres couvrant les trois grandes époques de la création du
compositeur, depuis les Huit Préludes
de 1928-1929 signés d’un Messiaen de vingt ans, jusqu’aux Six Petites Esquisses d’Oiseaux conçues entre 1985 et 1987, en
passant par deux des Vingt Regards sur l’Enfant Jésus, les cinquième et dixième, de 1944. Les premières pages sont
placées sous l’influence de Debussy, tandis que les suivantes, sous le signe du
mystère divin dont Messiaen fut l’un des grands chantres du XXe siècle,
sont un jaillissement permanent de rythmes et de résonances, alors que les
troisièmes présentent un festival de couleurs et d’exotisme dans lequel le
compositeur célèbre à la fois les volatiles et sa seconde compagne qui l’ont
inspiré sa vie durant.
Douée d’un nuancier d’une
diversité peu ordinaire, capable de colorisations infinies, Marie Vermeulin met
subtilement en relief l’impressionnisme des Préludes
par son toucher arachnéen, tandis qu’elle met somptueusement en exergue le
lyrisme et la spiritualité véhémente du Regard
du Fils sur le Fils et du Regard de l’Esprit
de Joie. Du second de ces Regards,
elle magnifie la grande diversité de couleurs et de timbres suscitée par
l’écriture de Messiaen qui n’est pas sans évoquer Franz Liszt. La musicalité à fleur de peau et la palette sonore
d’une richesse inouïe de la jeune pianiste exaltent les rutilances harmoniques des
Six Petites Esquisses d’Oiseaux, dont
Marie Vermeulin fait de véritables saynètes ornithologiques en donnant vie à
tout un monde magique qui, sous ses doigts ensorceleurs, prend véritablement chair.
Ce qui émane de ce disque est des grands artistes dont Marie de Vermeulin
possède indubitablement toutes les vertus.
Bruno Serrou
1 CD
Paraty 612118 (distribution Codaex). Durée : 64mn17s.
1) 2 CD Universal Classics
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire