Georg Friedrich Haendel (1685-1756), Ottone, re di Germania. De gauche à droite: Luigi De Donato (Emireno), Dilyara Idrisova (Teofane), Max Emanuel Cenčić (Ottone), George Petrou, Ann Hallenberg (Gismonda), Anna Starushkevych (Matilda), James Hall (Adalberto), Orchestre Il Pomo d'Oro. Photo : (c) Bruno Serrou
A Beaune, le chef grec George Petrou à la tête d’une brillante distribution
donne tout son lustre à Ottone, re di Germania de Haendel
Max Emanuel Cenčić (Ottone). Photo : DR
Pour l’ouverture de la 35e
édition du Festival international d’opéra baroque & romantique dont elle
est la fondatrice, Anne Blanchard a choisi le quinzième opéra de Georg
Friedrich Haendel (1685-1759), Ottone, re
di Germania (Othon, roi de Germanie).
Cinquième ouvrage pour le King’s Theater où a été créé en janvier 1723, s’appuie
sur un livret de Nicola Francesco Haym (1678-1729) adapté d’un autre livret
d’opéra, Teofane d’Antonio Lotti (v.1667-1740).
Othon II du Saint-Empire romain germanique dit Le Roux (v.955-983). Photo : DR
L’intrigue, qui se situe à Rome à
la fin du Xe siècle, s’inspire des fondateurs de la dynastie
Saxonne, Othon Ier dit le Grand et son fils vertueux Othon II dit le
Roux, qui étendirent leur empire jusqu’en Italie et se firent couronner empereurs
par le pape à Rome. L’action se focalise sur le mariage d’Othon II et de la
princesse byzantine Théophane, avec des références à la répression qu’Othon Ier
exerça sur l’usurpateur Berenger et son épouse (Gismonda dans l’opéra) et de
péripéties de l’empereur de Byzance Basile II (ici Emireno), frère de Teofane.
L’œuvre se déploie en trois actes d’une heure et compte six rôles enchaînant
les arie reliées par de courts
récitatifs, le tout soutenu par un orchestre chatoyant.
Photo : (c) Bruno Serrou
Cet opéra, l’un des plus grands
succès de Haendel, a été le premier repris au XXe siècle, en 1921 à
Göttingen. L’équipe réunie à Beaune est, à deux éléments près, la même que
celle de l’enregistrement qui vient de paraître chez Decca (2). Elle a donné
tout son lustre à cette œuvre dans laquelle le compositeur saxon instille une
variété d’affects emplis de sortilèges. Seul regret, comme souvent dans les
opéras du compositeur saxon, la rareté des ensembles, réduits à un superbe duo
des deux mezzo-sopranos, Gismonda et Matilda, à la fin du deuxième acte, un
autre à l’acte III entre Teofane et Ottone, et le sextuor final.
George Petrou. Photo : DR
Prévu aux hospices de Beaune, la
canicule (dommageable pour les instruments anciens et pour les voix), c’est
finalement la basilique Sainte-Marie qui a été le cadre de l’exécution d’Ottone en version concertante. La
réverbération plus marquée que dans la cours des hospices a légèrement troublé
la perception de l’orchestre, qui était placé derrière les protagonistes et
devant l’autel. En tête de distribution, le contre-ténor croate Max Emanuel Cenčić, voix d’une
plastique et d’une élasticité saisissantes. La soprano russe Dilyara Idrisova
s’impose en Teofane de sa voix lumineuse aux colorature aériennes et aux aigus triomphants.
La mezzo-soprano suédoise Ann Hallenberg est une Gismonda de grande classe, la
mezzo-soprano ukrainienne Anna Starushkevych est une Matilda engagée mais
manquant de graves. En Emireno, la basse italienne Luigi De Donato impressionne
par la profondeur de sa voix aux vocalises maîtrisées. Enfin, le contre-ténor
anglais James Hall, dans ses rares interventions, est un Adalberto au style irréprochable.
Bruno Serrou
1) Jusqu’au 13/07 (vendredi,
samedi, dimanche). Rens. : 03 80 22 97 20. www.festivalbeaune.com.
2) 3CD Universal/Decca
Article initialement publié dans les colonnes du quotidien La Croix