Théâtre des Champs-Elysées, jeudi 8 mars 2012
Valery Gergiev - Photo : DR
Quoique Russe, Igor Stravinsky n’est
pas encore familier aux orchestres de son pays, même les premières de ses œuvres
pourtant profondément enracinées dans la tradition de sa terre natale,
populaire et savante, avec une influence indéniable de Rimski-Korsakov. Cette
fréquentation peu suivie pendant près de soixante-dix ans se ressent encore
dans l’interprétation qu’en a proposé hier jeudi l’Orchestre du Théâtre
Mariinsky et son directeur Valery Gergiev, dans un programme monographique
présentant trois aspects de la création de Stravinski, l’un des trois grands
ballets commandés par Nijinski au tournant des années 1910 et deux partitions
de la période néo-classique, une page concertante et une symphonie avec chœur
conçues en 1929-1930.
Orchestre derrière le cadre de
scène, chef dirigeant mains nues et sans estrade mais partition devant le nez, le dispositif
rendait le son froid et distant. D’autant plus que, ouvrant avec le ballet sur
lequel se terminent généralement les concerts, Gergiev a retenu de Petrouchka non pas la version originale
de 1911 mais sur celle que Stravinski réalisa en 1947 pour en faciliter l’exécution
en concert, avec des cordes réduites (14-12-10-8-6) et le reste en proportion. Une
version plus terne, moins fauve, âpre, puissante, contrastée et dynamique que la
première mouture. Il convient néanmoins de saluer la performance des pupitres
solistes, particulièrement trompette, trombone et bois, mais de légers
problèmes de cors et des cordes pas assez étoffées et parfois désordonnées. C’est
en cela que l’on mesure combien l’âpreté des ballets de la première période de
Stravinski est encore étrangère aux musiciens russes.
En revanche, le Capriccio pour piano et orchestre de
1929, terriblement virtuose et exigeant côté rythmique avec ses nombreux et
terrifiants contretemps a été mené avec maestria, tant par l’orchestre que par
le soliste, Boris Berezovsky, surtout l’Allegro
conclusif lors de la reprise en guise de bis, Berezovsky exaltant des sonorités
qui fusionnaient avec les timbres de l’orchestre au milieu duquel le piano
était installé, queue face au public.
Les vingt minutes de la Symphonie de Psaumes composée en 1930 où
violons et altos sont absents, occupaient seules la seconde partie du concert.
Installées très loin derrière le cadre de scène, les cordes graves étaient
comme dans un brouillard d’où émergeait la lumière crue des instruments à vent dont
on entendait les soli à la perfection
et qui rendaient quasi inaudible le Chœur du Théâtre Mariinsky, dont on n’a pu
entendre clairement que deux mots dans le seul troisième mouvement (Psaume 150) : Laudate et Alleluia…
Bruno Serrou
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