L’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris a jeté les derniers feux des célébrations du centenaire de la mort de Massenet de l'Opéra de Paris
Palais Garnier, jeudi 15 mars 2012
Après une Manon contestable et fort contestée présentée à l’Opéra Bastille, une
exposition organisée à la Bibliothèque Garnier accompagnée d’un riche
catalogue, l’Opéra de Paris a clôturé son hommage au plus prolifique des
compositeurs français d’opéras sur un concert monographique avec orchestre de l’Atelier
lyrique de l’Opéra de Paris. Quatorze chanteurs de quatre promotions entrées
entre octobre 2008 et octobre 2011, donc des plus aguerris aux plus novices,
ont proposé des extraits de dix des quarante-deux opéras, des plus célèbres aux
moins courus, que Massenet a composés entre 1858 et 1912. La soirée a permis d’écouter
de larges extraits de ces ouvrages, incluant des ensembles et des scènes
entières associant dans les répliques et les chœurs les quatorze chanteurs. C’est
à Marianne Crebassa, entrée à l’Atelier en octobre 2010, qu’est revenu l’honneur
d’ouvrir et de fermer le concert. Voix de braise, diction exemplaire, timbre
épanoui, ligne de chant d’une rare perfection, musicalité éblouissante, la
mezzo-soprano montpelliéraine domine son sujet au point de brûler les planches,
brossant un air de Dulcinée « Quand la femme a vingt ans » extrait de
la comédie héroïque Don Quichotte
(1910) de feu, accompagnée par un chef d’orchestre, Guillaume Tourniaire, si
enthousiaste, que sa gestique s’est avérée ici pour le moins envahissante, et
un bouillonnant prince charmant dans le troisième acte du conte de fées Cendrillon (1899). Marianne Crebassa est
d’ores et déjà de plain-pied dans la cour des grands, ce qu’attestent d’ailleurs
ses prestations dans le cadre du Festival de Radio France et de Montpellier les
deux derniers étés. Membre de l’Atelier depuis cinq mois, le ténor portugais João Pedro Cabral atteste d’une voix d’une belle plastique mais encore
peu épanouie, trahissant sans doute un chanteur encore timide et réservé dans l’air
de Jean « Liberté, liberté, c’est elle que mon cœur… » extrait du « miracle »
le Jongleur de
Notre-Dame (1902). A l’instar de la
mezzo-soprano Anna Pennisi (2011) qui, dans l’air du Prince « Allez,
laissez-moi seul » de Cendrillon affirme un timbre séduisant mais une articulation perfectible. La
soprano chinoise Chenxing Yuan (2010) conforte le potentiel déjà prégnant dans
ses prestations depuis la saison dernière dans les deux extraits de Manon (1884), que l’on a d’autant plus appréciés qu’ils étaient exempts de
la catastrophique mise en scène vue à Bastille en janvier dernier. Toujours
dans Manon, le baryton bordelais Florian Sempey (2010) a imposé sa voix puissante
dans l’air de Lescaut « A quoi bon l’économie », tandis que dans la
scène finale d’Ariane (1906) la soprano roumaine Andrea Soare (2011) a révélé une voix resplendissante
mais un accent trop prononcé. La soprano polonaise Ilona Krzywicka (2009) a
rayonné dans l’air « Rêve infini, divine extase » extrait de la « légende
sacrée » la
Vierge (1880), après avoir donné d’excellentes
répliques dans Manon et Ariane. Dans l’air de Lentulus « Je vais la voir » extrait de Roma (1912), le ténor français Cyrille Dubois (2010) est apparu maître de
son art, à l’instar du baryton-basse australien Damien Pass (2011), du moins dans
son jeu et sa présence, sa prestation démontrant en revanche qu’il a besoin de mûrir dans
la conduite de sa voix, à en juger du moins avec l’air du diable extrait du conte lyrique Grisélidis (1901). La mezzo-soprano polonaise Agata Schmidt (2011) a chanté une
ardente Charlotte de Werther (1892) dans l’air des lettres, le timbre est
charnu, la voix émouvante, mais la ligne de chant et le jeu manquent encore d’assurance. En revanche,
l’Hérode du baryton polonais Michal Partyka (2009) est noble et ardent dans Hérodiade (1881). Il convient également de saluer la courte mais impeccable
intervention de la soprano lyonnaise Julie Mathevet (2008) en fée à la fin du concert dans Cendrillon, et la participation sans faute du ténor toulousain Kévin Amiel (2011)
en chevalier Des Grieux. Mais le héros de la soirée a été l’Orchestre de l’Opéra
national de Paris, cordes, sous la houlette de son premier violon Karin Ato,
bois (particulièrement le saxophoniste Guillaume Pernes) et cuivres,
singulièrement les cors. Tous les pupitres ont répondu avec enthousiasme aux intentions de la direction
convaincue du chef suisse Guillaume Tourniaire, enveloppant de leurs sonorités
pleines et charnelles les jeunes voix de l’Atelier lyrique.
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