Né à Sarlat en 1992, vainqueur
des concours de la Société des Arts de Genève, artiste associé à la Fondation
Singer Polignac, élève de Vahan Mardirossian, de Jacques Rouvier, du regretté Nicholas
Angelich, de Roger Muraro et de Michel Dalberto, Ismaël Margain réunit pour son
premier disque pour le label Naïve deux des trois compositeurs les plus
marquants s’étant exprimés à travers l’impromptu pour piano, Frédéric Chopin et
Gabriel Fauré, qui, après Franz Schubert en 1827, ont porté haut ce genre libre
d’essence éminemment romantique, son caractère semi improvisé ouvrant au lyrisme
et à une virtuosité retenues.
Cas exceptionnel pour le genre
qui privilégie le piano pour être relevé, l’Impromptu
op. 36 de Fauré a initialement été composé pour harpe en 1904 avant qu’Alfred
Cortot le transcrive pour le piano et le publie en 1913. Chopin écrivit ses
trois Impromptus et sa Fantaisie-Impromptu
entre 1834 et 1842, Fauré les six siens entre 1881 et 1909. Camille Saint-Saëns
créa les trois premiers impromptus de Fauré, en 1882 pour le mi bémol majeur op. 25 et 1885 pour les
deux autres, fa mineur op. 31 et la bémol majeur op. 34, Marguerite Long
le cinquième en fa dièse mineur op. 102,
en 1909.
Tout en préservant avec attention et sensibilité la spécificité de chacun, Ismaël Margain éclaire la parenté entre leurs styles et leur inspiration, organisant la diversité des atmosphères en prenant le soin d’alterner les compositeurs autour de tonalités similaires. « Il existe une parenté évidente entre leurs écritures, dans l’improvisation, écrit le pianiste dans la pochette de son disque. Les impromptus de Fauré m’évoquent bien plus Chopin que Schubert, dans leur écriture comme dans leur forme, musicale assez structurée et la spontanéité que suggère la notion-même d’impromptu. »
Les trois premiers impromptus de
Fauré sont proches du langage de Chopin, qui imprégnait alors la création
pianistique à la même époque la création du cadet au point de puiser les titres
de ses œuvres dans le catalogue de son aîné, égrenant nocturnes, préludes,
barcarolles, mazurkas, ballade… A l’écoute de ce disque, l’auditeur perd toute
notion de temps et d’époque, la chronologie s’estompant rapidement tant le
parcours est rationnel et le discours équilibré, au point que l’oreille se
laisse volontiers séduire et vagabonder au fil de l’écoute. Pourtant, l’interprète
ne cherche aucunement à brouiller les pistes, n’annihilant ni même n’amoindrissant
à aucun moment styles et époques de chacune des pièces et de chacun des compositeurs.
Nulle lassitude ne point, les quatorze œuvres, aussi brèves soient-elles - la plus
courte, l’Invention de Fauré, durant une
minute et quarante-sept seconde, la plus longue, l’Impromptu op. 86 de Fauré, se déployant sur huit minutes et
quarante-neuf secondes -, dessinant de son touché solaire des paysages d’un
onirisme simple et profond empli de sortilèges mélodiques et sonores exaltés
par un Ismaël Margain véritable peintre-magicien-poète qui brosse une ode au
lyrisme évocateur baignée de nostalgie, de tendres effusions, d’ardente
luminosité.
L’album Impromptus se termine comme il a commencé, sur Fauré, mais non pas sur
un impromptu, mais sur l’Improvisation en
ut dièse mineur op. 84/5, avant de
conclure sur une autre Improvisation,
cette fois du pianiste-même à partir de la Berceuse
en ré bémol majeur op. 57 de Chopin -
la pénultième plage du CD -, dans lequel Ismaël Margain reprend des matériaux
des pièces de son programme.
1 CD Naïve V7860. Durée : 59mn 21s. Enregistré du 13 au 17 février 2021 en l'hôtel de la Fondation Singer-Polignac à Paris. DDD
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