Paris, Auditorium du Louvre, mercredi 7 décembre 2011
Liszt par Lise de la Salle
Bicentenaire oblige, Franz Liszt (1811-1886) aura occupé l’avant scène
musicale 2011. Moins omniprésent cependant que Frédéric Chopin voilà deux ans,
le compositeur hongrois de dimension universelle – né en Hongrie, il vécut
longuement en France, après que le Conservatoire lui eut refusé l’accès, avant
de s’installer en Allemagne et de faire de l’Italie sa terre d’adoption – il aura
néanmoins été programmé un peu partout en France, avec plus ou moins de bonheur
et de diversité. En effet, malgré une prolifique et passionnante production
pianistique – sans oublier les œuvres chorales, oratorios, lieder, symphonies, poèmes
symphoniques dont il est l’inventeur et qui ont longtemps fait les délices des
sociétés de concert et sont désormais outrageusement négligés par nos
orchestres – les programmateurs ont guère modulé leurs choix, les pianistes
jouant trop systématiquement les mêmes pages.
Huit jours après l’intégrale des Années
de pèlerinage que Bertrand Chamayou a donnée Théâtre des Champs-Elysées
sous l’égide de Jeanine Roze Productions auquel je n’ai pas pu assister, Lise
de la Salle a proposé mardi sur le plateau d’un Auditorium du Louvre archicomble
et devant les caméras de Medici.tv qui le diffusaient en direct sur la toile un
programme bien élaboré, reprenant pour l’essentiel son beau CD paru chez Naïve(1)
en juillet dernier, avec des œuvres grand public du compositeur, mettant son éclectisme
en exergue. A 23 ans, Lise de La salle atteste d’une belle maturité dans les
grandes pages de la première partie du concert, lancé par la Ballade en simineur S. 171 de 1853, qui a ainsi mis le curseur très haut dès le
début de sa prestation, sa technique parfaite lui permettant d’exalter une
éblouissante musicalité. Tout comme les déchirantes Funérailles (septième des Harmonies
poétiques et religieuses) composées en octobre 1849 en hommage à trois des victimes
de la révolution hongroise que Lise de la Salle a jouées comme un authentique
poème symphonique. Après Nuages gris,
pièce de la dernière période de Liszt (1881) interprétée avec mélancolie mais sans
affectation, Lise de la Salle a conclu cette première partie donnée sans pause
sur la fantaisie quasi sonate Après une
lecture du Dante (1839/1849) dernière pièce de la Deuxième Année depèlerinage :Italie, grande sonate en un seul
mouvement où Liszt dépeint l’Enfer de
Dante et à laquelle la jeune pianiste a donné toute sa puissance, sa passion et
sa dimension orchestrale. La seconde partie est apparue plus convenue, les arrangements
et transcriptions choisies n’étant pas les plus évocatrices, à l’exception de
la Mortd’Isolde (1867), à laquelle il a manqué un brin de passion, les
mains aériennes et impérialement maîtrisées de la pianiste exaltant la
diversité des voix de l’orchestre et du chant wagnériens entièrement restitués
par les dix doigts de l’instrumentiste. Le Lacrimosa
de Mozart (1865) est apparu long et anecdotique, tout comme les deux lieder de
Schumann (Liebeslied et Frühlingsnacht – ce dernier étant le
seul morceau ne figurant pas sur le CD Naïve, remplaçant Mazeppa de Liszt que l’on eut préféré écouter hier soir), et l’on
eut apprécié que fut retenu un autre (voire plusieurs autres) lied(er) de Schubert
que le célébrissime Ständchen…
Dommage aussi que, après un premier bis consacré à Bach, les deux suivants aient
détruit l’atmosphère générale du récital, les Pas sur la Neige de Debussy étant chaussés de lourds après-skis, et
l’extrait de Roméo etJuliette de Prokofiev trop démonstratif.
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