Aldo Ciccolini, récital émotion Salle Pleyel
Samedi 10 décembre 2011
Récital émouvant samedi soir Salle Pleyel d'Aldo Ciccolini. A près de 87 ans, l'immense pianiste
d'origine italienne est apparu en grande forme, alors qu'il avait
annulé ce récital prévu à l'origine le 5 octobre dernier. Après avoir modifié son programme
initial, qui devait être entièrement consacré à Liszt, Ciccolini a
finalement fait un mixe, avec une première partie vouée à Wolfgang Amadeus Mozart et
Muzio Clementi, et la seconde à Franz Liszt, mais, cette fois, avec des œuvres moins athlétiques
Les Mozart
de Ciccolini sont apparus simples, lumineux, alternant grâce et
profondeur, spiritualité et sensualité. Aussi bien dans la Fantaisie en
ut mineur n° 14a Kv. 475 enchaînée avec sa jumelle, la Sonate n° 14b Kv. 457 de la
même tonalité, deux œuvres publiées en 1785 sous le numéro d'opus 11.Dans la seconde, aux élans tragiques, Ciccolini a imposé son extraordinaire
rondeur de son, à l'instar de la somptueuse et dramatique Sonate en
sol mineur op. 34 n° 2 de Clementi, d'une intériorité exceptionnelle. Ce
que le pianiste a pérennisé dans les transcriptions de Liszt, autant celles de pages de ses contemporains, une voluptueuse Danza sacra e duetto
finale d'Aida de Giuseppe Verdi, d'une incroyable évidence, enchaînée avec
l'Isoldens Liebestod aus Tristan und Isolde d'après Wagner d'une
grandeur ineffable, tandis que les mains de Ciccolini semblaient
survoler le piano comme en apesanteur, que celles de Liszt même, concluant dans l'onirisme de
trois extraits des Harmonies poétiques et religieuses (Hymne de l'enfant
à son réveil, transcription d'une pièce chorale pour voix de femmes, Miserere, transcription d'un motet entendu Chapelle Sixtine, et Invocation, partition originale qui ouvre en fait le recueil des Harmonies).
Devant un public énorme (pas une
place de libre !), se déplaçant à petits pas, hésitant en quittant la
scène pour entrer dans la coulisse à cause d'une mauvaise ombre sur
le seuil, Ciccolini communiait avec la foule qui l'acclamait et à
laquelle il a fait le présent de deux tendres bis. Était-ce un concert
d'adieu ?... C'est en tout cas le sentiment que laisse ce récital où le temps a semblé comme suspendu, bouclant la boucle de la vie d'un artiste qui aura été l'un de mes premiers compagnons musiciens, l'ayant croisé enfant plus d'une fois dans les murs de l'Ecole Marguerite Long au tournant des années 1950-1960, avant d'en faire le "héros" du tout premier disque acheté avec des économies de pré-adolescent, un superbe disque à couverture grise "la Voix de son maitre", réunissant les Concertos pour piano et orchestre n° 1 de Tchaïkovski et n° 2 de Rachmaninov, avec l'Orchestre national de la Radiodiffusion française dirigé par Constantin Silvestri...
Bruno Serrou
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire