mardi 6 décembre 2011
Pascal Dusapin fait son Nietzsche
De la
rencontre entre le
compositeur français Pascal Dusapin et le baryton autrichien
Georg Nigl est né O Mensch
!.
Depuis
Richard Wagner, nombre de compositeurs se sont attachés à l’œuvre de
Friedrich Nietzsche,
lui-même compositeur à ses heures. Pascal Dusapin a choisi de mettre en
musique
vingt-quatre poèmes dans l’original allemand de l’auteur du Gai
savoir pour réaliser un cycle de vingt-quatre lieder et
quatre interludes composé à l’attention du baryton autrichien Nigl, qui participa à la création des deux derniers opéras de Dusapin (Faustus, The Last Night et Passion), et de la pianiste Vanessa
Wagner, à qui le compositeur a dédié deux de ses Etudes
pour piano. Dusapin a également signé la
mise en scène de ce
spectacle, qui a pour sous-titre « Inventaire musical non raisonné de
quelques
passions nietzschéennes ».
L’une des
particularités de cette
œuvre réside en sa genèse, qui a suscité une opération
inédite dans le monde du spectacle vivant : une souscription
individuelle de 3000
euros pour compléter le financement de l’œuvre par le Théâtre des
Bouffes du
Nord qui a réuni vingt-sept donateurs, un pour chacune des parties du
monodrame. Soit vingt pour cent du budget du spectacle pour lesquels les
commanditaires ont reçu en échange un certain nombre d’avantages dont un
exemplaire personnalisé de la partition autographe enrichie de photos et
de
dessins réalisés par le compositeur…
Véritable cycle
de lieder pour voix et piano, O Mensch ! de Pascal
Dusapin sur des poèmes de Friedrich Nietzsche se présente dans l'esprit d’un monodrame. Sur le plateau, un piano
dans le
noir côté jardin, un homme qui chante tout en se déplaçant côté cours et
au
centre de la scène, avant de s'appuyer sur le piano, qu’il se met à jouer dans les dernières minutes du spectacle, sur l’aigu
du
clavier. L’Homme est une sorte de
« Janus » qui marche et qui cherche, entouré d’ombres, de contours et
de quelque visage, pris dans des filets de lumière, d’eau et de feu. Le cycle s’ouvrant sur le poème éponyme O
Mensch, l'on ne peut s'empêcher de
penser dans un premier temps au lied du même titre que Mahler intégra à
sa Symphonie
n° 3. Puis le monodrame se tourne
vers une tristesse schubertienne, avant de glisser dans
la
désolation, les passages les plus enlevés étant en vérité les plus
graves et
douloureux. Cette solitude éprouvante de l’Homme est soulignée par
l’apparition
de l’accord de Tristan de Richard
Wagner. L’environnement informatique et vidéo réalisé par
Thierry Coduys campe des espaces acoustiques mouvants, la nature
nocturne qui
emporte l’âme du Wanderer et invite le spectateur au voyage. Mais
l’alliage ne
prend pas vraiment et laisse l’auditeur sur le bord de la route.
Peut-être en
raison d’un piano qui se cantonne dans le grave du clavier, le plus
souvent
dans un climat d’une lenteur écrasante, tandis que l’écriture vocale se
situe dans
la tradition du lied, sans surprise ni renouveau, cela soixante-quinze
minutes
durant. Le tout est interprété avec délicatesse et émotion par les
dédicataires,
Georg Nigl et Vanessa Wagner.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire