Philippe Hurel (né en 1955). Photo : (c) Ircam
« Le son de l’orchestre,
cela reste magique ! » Pour ses 60 ans qu’il célèbrera le 24 juillet,
Philippe Hurel a parachevé un grand cycle symphonique d’une heure, Tour à Tour, dont le volet central pour
orchestre et électronique a été créé début juin dans le cadre du Festival
ManiFeste de l’Ircam (1), qui lui consacre un second concert le 20 juin (2). « Je
me suis laissé tenter par la composition d’une œuvre longue pour voir ce dont je
suis capable sur la grande forme orchestrale tandis que je terminais l’opéra les Pigeons d’argile (3) »
Après
cet opéra, projet épuisant, nerveusement, physiquement, moralement, écrire pour
l’orchestre, qui plus est avec électronique, est apparu à Philippe Hurel plus difficile encore
« parce que l’œuvre n’est pas sous-tendue par un texte ». Cette
grande page d’orchestre en trois parties occupe l’esprit du compositeur depuis
2007.
Pourtant, Hurel s’est imposé par son sens de la miniature au service d’œuvres
pour ensembles et chambristes raffinées écrites avec minutie mais toujours portées
par un élan, une spontanéité qui reflètent sa personnalité généreuse, parfois
excessive. « Quand Hurel venait dans ma classe au Conservatoire de Paris,
se souvient pourtant son maître Ivo Malec, il était pâle, et il tremblait de tout son être. Je n’ai jamais
su pourquoi. »
Très vite, il se rapproche du mouvement spectral en vogue à
l’époque auprès des jeunes compositeurs en rupture avec l’avant-garde sérielle,
suivant les cours de Tristan Murail « presque en cachette ». Son
attrait pour les musiques populaires marque également son style, immédiatement
identifiable par sa pulsation, son énergie, son impulsivité toute en pertinence.
« J’aime ouvrir mes écoutilles sur autre chose que la musique "savante". Entre mes compositions, la programmation de mon Ensemble
Court-Circuit que j’ai créé en 1992, mon travail de pédagogue, d’abord à
l’Ircam puis au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon où j’enseigne depuis deux ans, j’entends
m’aérer en écoutant des musiques qui n’ont rien à voir avec ce que je fais. »
Joué depuis 1986 par l’Ensemble Intercontemporain, dirigé par Pierre Boulez,
Esa-Pekka Salonen, Kent Nagano, Péter Eötvös qui l’ont imposé jusqu’aux
Etats-Unis, Philippe Hurel est aujourd’hui un compositeur qui compte. « Soixante ans est
l’âge qu’avaient Pierre Boulez et Ivo Malec quand je suis arrivé à Paris. Ils étaient mes
modèles. Je me sens désormais plus libre esthétiquement, plus indépendant de l’opinion
des gens, moins angoissé par l’avenir. Je ne crains plus d’être joué et jugé à
Paris. Je sais aussi qu’il me reste peu de temps pour réaliser mes projets. Il
me faut donc être plus sélectif et n’accepter que ce que j’ai envie de
faire. Notamment un nouvel opéra… »
Bruno Serrou
1) Jusqu’au 2/07, réservations : 01.44.78.12.40, manifeste2015.ircam.fr.
2) Centre Pompidou le 20/06.
3) Créé avec succès au Capitole de Toulouse le
15/04/2014, cet opéra fait l’objet d’un DVD à paraître en septembre chez Opus
Arte
Article paru dans le quotidien La Croix daté lundi 15 juin 2015. Page 20, rubrique Culture et La Croix Internet http://m.la-croix.com/Culture/Musique/Philippe-Hurel-un-musicien-toujours-aussi-libre-de-ses-choix-2015-06-15-1323644?artn=1323644&artc=1&sctn=8666
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