Deux géants de leur génération se retrouvent pour
la première fois réunis sur un même support discographique, Martha Argerich et
Itzhak Perlman. Avant la réalisation de ce CD, la pianiste argentine et le
violoniste états-uniens s’étaient produits ensemble une seule fois, le juillet
1998à New York, Saratoga Performing Arts Center. Ce soir-là, ils avaient joué
la Sonate pour violon et piano n° 1 en la
mineur op. 105 que Robert Schumann a composée en 1851. Un petit quart d’heure
de musique heureusement capté live, préservé
et publié ici pour la toute première fois. Il est complété par trois œuvres enregistrées
en studio fin mars 2016 à Paris, Salle Colonne, une semaine avant le concert de
Perlman à la Philharmonie (voir http://brunoserrou.blogspot.fr/2016/04/itzhak-perlman-radieux-attire-les.html).
Argerich, qui avait enregistré les deux sonates de Schumann avec Gidon Kremer
pour DG, trouve en Perlman un partenaire du même acabit, les deux musiciens
suscitant de ces pages passionnées une interprétation flamboyante et
chaleureuse, les deux artistes exaltant un plaisir de jouer ensemble particulièrement
contagieuse.
Photo : (c) Jean-Baptiste Millot / Warner Classics
Les Trois Fantasiestücke pour violon et piano op. 73 de 1849 du même Robert Schumann sont à
l'origine pour clarinette et piano. Mais il existe également des transcriptions
pour violon, alto et violoncelle. Toutes ces associations ont leur cachet, même
si naturellement la couleur si caractéristique de l’instrument à anche est plus
chaude et mélancolique que les autres, à l’exception de l’alto, qui est dans le
même registre que la clarinette. Ce que font ici Argerich et Perlman est d’une
pureté absolue. L’entente entre les deux musiciens est tout aussi éclatante
dans le Scherzo de la Sonate F-A-E que Schumann commanda à Johannes
Brahms en 1853 et que le duo transcende.
Photo : (c) Jean-Baptiste Millot / Warner Classics
La dernière œuvre du programme peut constituer en en soi une surprise, mais
elle s’avère en fait une sorte de référent. Il s’agit en effet de la Sonate pour clavier violon n° 4 en ut mineur
BWV 1017 de Jean-Sébastien Bach, en fait une pièce tirée des sonates en
trio écrites par le futur Cantor à Cöthen, que Martha Argerich interprète pour
la première fois. L’on y trouve dans le largo du mouvement initial le thème de
l’aria Erbarme dich que Bach
reprendra et développera à Leipzig dans
sa Passion selon saint Matthieu. Du
violon de Perlman émane une lumière incandescente rehaussée par le piano
céleste d’Argerich.
Un disque enchanteur à se procurer coûte que coûte.
Bruno Serrou
1 CD Warner Classics
0190295937898. 50mn 58s. Enregistré en 1998 et 2016.
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