Quelques heures après l’annonce
du décès de son aînée Lisa Della Casa, est parvenue la nouvelle de la mort
survenue aujourd’hui, mardi 11 décembre 2012, de Galina Vichnievskaia à l’âge
de 86 ans.
Entrée vivante dans la légende de
l’opéra russe, Galina Vichnievskaia est née en 1926 à Leningrad (Saint-Pétersbourg),
où elle a commencé sa carrière en 1944 en chantant l’opérette. Après une année
d’études avec Vera Nikolayevna Garina, elle remporte un concours qui lui permet
d’être auditionnée au Théâtre Bolchoï de Moscou, dont elle sera l’une des
grandes solistes. Elle y interprètera plus de trente rôles, s’y imposant par
son sens de la tradition du chant russe, sa rigueur, sa force dramatique très
sûre, ce qui fait d’elle une immense Tatiana d’Eugène Onéguine de
Tchaïkovski et une impressionnante Katerina Ismaïlova de Lady Macbeth du District de Mzensk de Dimitri Chostakovitch, dont
elle est l’amie avec son mari, le violoncelliste chef d’orchestre Mstislav
Rostropovitch, qu’elle a épousé en 1955, ainsi que de Serge Prokofiev, dont
elle a créé l’opéra Guerre et Paix,
et d’Alexandre Soljenitsyne, que le couple Rostropovitch héberge dans sa
datcha, ce qui lui vaut la déchéance de leur nationalité en 1978, tandis qu’ils
se trouvent tous deux en Occident depuis quatre ans.
Née à Leningrad, élevée par sa
grand-mère maternelle après la mort de ses parents durant le siège de
Leningrad, Galina Vichnievskaia apprend le chant directement sur la scène, dans
des opérettes, avant de suivre des cours de chant. En 1953, une audition réussie
au Bolchoï lui permet d’être immédiatement engagée pour chanter le rôle de Tatiana
d’Eugène Onéguine. Le succès est si grand qu’elle se voit aussitôt confier
Butterfly, Chérubin, Léonore, Aïda, Marguerite… En 1955, elle épouse Mstislav Rostropovitch,
qui sera son pianiste accompagnateur dans tous ses récitals de mélodies jusqu’à
la mort du violoncelliste en 2007. En 1962, elle est invitée par la Scala de
Milan, en 1963-1964 par le Covent Garden de Londres. En 1962, Benjamin Britten
écrit pour elle la partie de soprano de son War
Requiem, qui sera créé sans elle le 30 mai 1962 en la cathédrale de
Coventry reconstruite, le gouvernement soviétique ne lui ayant pas donné l’autorisation
de quitter Moscou pour l’occasion (1). Pendant vingt ans, au Bolchoï, elle fait
revivre le grand répertoire russe, italien, allemand et français. Parmi les
créations auxquelles elle a participé, la Symphonie
n° 14 (1964), Satires (1960) et
les Sept Romances sur des poèmes d’Alexandre Blok (1967) de
Chostakovitch, l’Echo du poète (1967) de Britten, Un Enfant appelle (1979) et La Prison (1983) de Marcel Landowski,
qui tirera de ses mémoires l’opéra Galina,
le Requiem polonais (1984) de Krzysztof
Penderecki. Galina Vichnievskaua a terminé sa carrière à l’Opéra de Paris en
1982, en chantant une ultime Tatiana, trente ans après ses débuts sur la scène
du théâtre Bolchoï dans ce même rôle.
Mstislav Rostropovitch et Galina Vichnievskaia
Ayant recouvré sa nationalité
russe en 1990, tout en gardant sa naturalisation suisse acquise en 1982, elle avait
ouvert à Moscou voilà dix ans le Centre de chant d’Opéra où elle a enseigné le
chant jusqu’à sa mort. Sa mort survient cinq ans, sept mois et deux semaines après celle de Mstslav Rostropovitch, son mari.
Bruno Serrou
1) Fort heureusement, Galina
Vichnievskaia a pu participer dès 1963 à l’enregistrement Decca dirigé par
Britten avec le London Symphony Orchestra, aux côtés de Peter Pears et de Dietrich
Fischer-Dieskau. L’ingénieur du son, John Culshaw, a rapporté que la soprano
russe a protesté pendant l’enregistrement, parce qu’elle souhaitait être placée
avec les solistes hommes plutôt qu’avec le chœur.
Bibliographie
Galina (autobiographie), Editions Fayard (1985)
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