mercredi 8 février 2012

Le New York Philharmonic Orchestra et Alan Gilbert au sommet, Lang-Lang sans souffle


Paris, Salle Pleyel, mardi 7 février 2012


Alan Gilbert et le New York Philharmonic Orchestra - Photo : DR

Concert de très grande classe que celui qu’a offert hier soir le New York Philharmonic Orchestra, Salle Pleyel, sous la direction d’airain de son directeur musical depuis septembre 2009 Alan Gilbert, premier chef d’orchestre new-yorkais à occuper cette fonction. Une lumineuse et puissante interprétation de Feria de Magnus Lindberg (né en 1958), actuel compositeur en résidence du New York Philharmonic, œuvre d’une vingtaine de minutes pour orchestre composée en 1997 dans laquelle le compositeur finlandais reprend un passage du Lamento d'Ariane de Claudio Monteverdi qui distille davantage une couleur harmonique transcendant le simple renvoi d’une citation traditionnelle. La progression festive mêlée de contemplation avant un retour à la furia a été magistralement menée par Alan Gilbert a la tête d’un NYPO aux timbres savoureux.


Le Concerto n° 2 pour piano et orchestre (1930-1931) de Béla Bartók laisse plus dubitatif. La disposition de l’orchestre tout d'abord. Celui-ci était en effet réparti de façon plutôt rare, bois et cuivres en randonnions, les premiers sur deux rangs, les seconds sur un seul, côté jardin, les cors à gauche des cuivres, les timbales à leur côté, puis la percussion, premiers violons, altos et violoncelles derrière le piano, contrebasses dans la continuité des violoncelles, et seconds violons côté cour... Le chef planta son pupitre face aux instruments à vent, tenant le pianiste dans le champ de vision de son œil gauche, avant de reprendre sa place classique dès le premier Adagio. Le soliste, ensuite, Lang-Lang, désormais sponsorisé par la marque Montblanc après l’avoir été par les chaussures de sport Nike, qui joue le chef-d’œuvre de Bartók le nez dans la partition tandis qu'une jeune femme lui tourne dextrement les pages. Le Chinois joue de façon distante et froide, tel un métronome, sans âme ni foi, comme paralysé par l’exploit qui consiste à jouer une œuvre difficile qu’il ne maîtrise apparemment pas encore. Bertrand Chamayou, sous la direction de Pierre Boulez avec l’Orchestre de Paris, était autrement convainquant en décembre dernier dans cette même salle... Du coup, l’orchestre new-yorkais est resté en-deçà de sa virtuosité naturelle, et, malgré son évidente retenue, il n’a pas pu éviter de couvrir souvent le piano, dont le son s’est avéré notoirement étriqué. En bis, Lang-Lang a joué par coeur une romance de Liszt qui, sous ses doigts et avec des ppp fins comme la soie, s’est faite sirupeuse.

En seconde partie, le New York Philharmonic et son chef titulaire ont offert une exceptionnelle Symphonie n° 5 en si bémol majeur op. 100 (1944) de Serge Prokofiev, bondissante, tendue, aérienne, une fête de rythmes, de timbres et de fureur. En bis une furieuse Marche hongroise extraite de la Damnation de Faust de Berlioz qui a mis le feu à la salle. Le NYPO reste décidément l’une des plus remarquables phalanges symphoniques au monde.
 Bruno Serrou
 


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