Chanteur
parmi les plus éminents de la grande école de chant anglaise du XXe siècle,
le baryton-basse John Shirley-Quirk s’est éteint lundi 7 avril. Il avait 82
ans.
John Shirley-Quirk (1931-2014). Photo : DR
Membre
de 1964 à 1976 de l’English Opera Group fondé et dirigé par Benjamin Britten,
John Shirley-Quirk restera comme l’un des plus éminents interprètes du
compositeur, autant à la scène qu’au disque, gravant avec lui non seulement
nombre de ses œuvres mais aussi de partitions comme les Scènes du Faust de Goethe
de Robert Schumann.
Né à
Liverpool le 28 août 1931, il avait commencé à chanter dans un chœur d’enfants,
avant de commencer le violon. A l’Université de Liverpool, tout en suivant des
études de chimie et de physique, il étudie le chant avec Austen Carnegie. Professeur
de Sciences, il se rend en 1957 à Londres où il est l’élève de Roy Henderson.
Quatre ans plus tard, il fait ses débuts sur une scène lyrique au Festival de
Glyndebourne dans le rôle de Gregor Mittenhofer d’Elégie pour jeunes amants
de Hans Werner Henze, et, en 1962, dans le Docteur de Pelléas et Mélisande de Debussy. Il chante au Scottish Opera,
puis, recruté par Britten en 1964, il devient membre de l’English Opera Group,
où il restera jusqu’à la mort du compositeur. Il s’y imposera comme son
incontournable interprète, créant les Church
Parables - il donne The Prodigal Son
aux Festivals d’Aldeburgh, Versailles, Londres, Flandres et Edimbourg -, Owen Wingrave
et Death in Venice. Pour la télévision britannique, il participe à une
production de Billy Budd dirigée par Britten.
En 1973, il se produit pour la première fois au Covent Garden de Londres, et en
1974 au Metropolitan Opera de New York. Puis c’est la Scala de Milan… En
juillet 1977, il crée le rôle de Lev dans The
Ice Break de Michael Tippett. Parmi ses grands rôles, Alfonso dans Cosi fan tutte et Don Giovanni de Mozart,
Eugène Onéguine de Tchaïkovski, Pimène de Boris
Godounov de Moussorgski, et Arkel de Pelléas
et Mélisande de Debussy. Il a également chanté le Château de Barbe-Bleue à Berlin, Wozzeck à Saint Louis...
Peter Pears et John Shirley-Quirk dans Death in Venice de Benjamin Britten. Photo : (c) Anthony Crickmay/Metropolitan Opera Archives
John
Shirley-Quirk est également célébré comme interprète du répertoire mélodique et
avec orchestre, du répertoire baroque à la musique du XXe siècle, se
produisant à travers le monde avec les grands orchestres internationaux. Il
aura également enregistré plus d’une centaine de disques, dans des œuvres de Claudio
Monteverdi, Jean-Sébastien Bach, Georg Friedrich Haendel, Joseph Haydn, Félix
Mendelssohn-Bartholdy, Hector Berlioz, Robert Schumann… En 1982, il a été nommé
directeur artistique associé du Festival d’Aldeburgh, puis il enseigna le chant
à partir de 1991 au Conservatoire Peabody de Baltimore. En 2008, il participa
au financement de la campagne de Barak Obama. En 1975, il avait été élevé au
rang de Commandeur de l’Ordre de l’Empire Britannique.
Si
sa voix n'était pas des plus amples, la puissance de ses interprétations et sa rare
perspicacité de pénétrer la pensée de Britten l’ont rendu indispensables au
compositeur, qui avait besoin d'un chanteur fiable, capable de transformer ses
concepts dans une interprétation scénique crédible. Il était un éminent
interprète de Bach, qu’il se plaisait à chanter aux côtés de chanteurs comme
Janet Baker, Heather Harper et Philip Langridge. Parmi ses disques, les Scènes du Faust de Goethe de Schumann sous
la direction de Britten, L’Echelle de
Jacob de Schönberg avec Pierre Boulez, A
Midsummer Night’s Dream, Billy Budd,
The Rape of Lucrecia et Death in
Venice de Britten dirigés ou supervisés par le compositeur, les Cantate BWV 170, 82 « Ich habe genug »
et 159 de Jean-Sébastien Bach avec
Neville Marriner, Dido and Aeneas
de Purcell avec Colin Davis…
Bruno Serrou
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