Toulouse,
Théâtre du Capitole, dimanche 22 décembre 2013
Engelbert Humperdinck (1854-1921), Hänsel et Gretel. Silvia La Muela (Hänsel) et Vannina Santoni (Gretel). Photo : (c) Patrice Nin, Théâtre du Capitole de Toulouse
Huit mois après l’Opéra de Paris
(voir http://brunoserrou.blogspot.fr/2013/04/hansel-und-gretel-de-humperdinck-fait.html), le Théâtre du
Capitole de Toulouse présente en cette fin d’année une nouvelle production,
cette fois avec le Théâtre de Nuremberg. Beaucoup d’enfants ont assisté dimanche
à la première, malgré le beau soleil qui enluminait la célèbre place éponyme
envahie par le mercantile marché de Noël où la foule se bousculait bruyamment. Accompagnés
de leurs parents, ils ont découvert l’un des rares ouvrages lyriques
directement écrits à pour eux. Pour leur rendre l’œuvre plus accessible, a
contrario du Théâtre du Châtelet en 1997 et de l’Opéra de Paris en avril
dernier, la direction du Capitole a choisi l’adaptation française du texte réalisée
par le poète Catulle Mendès, autre adepte du Magicien de Bayreuth. Créé
le 23 décembre 1893 à Weimar sous la direction de Richard Strauss, Hänsel et Gretel d’Engelbert Humperdinck (1854-1921), disciple
de Richard Wagner, est l’opéra que les théâtres germaniques et anglo-saxons
programment quasi systématiquement aux temps de Noël. Composé en 1891 sur un livret de
la sœur du compositeur adapté d’un conte des frères Grimm, Hänsel et
Gretel ordonnance avec brio des chants traditionnels allemands au sein
d’une orchestration et de leitmotive d’essence wagnérienne qui évoquent
surtout Siegfried, particulièrement la Scène de la forêt de l’acte II, le Crépuscule des dieux et Parsifal.
Rare en France, l’ouvrage semble y connaître depuis deux ans une sorte de
retour en grâce.
Engelbert Humperdinck, Hänsel et Gretel. Silvia de La Muela (Hänsel), Vannina Santoni (Gretel), Jeannette Fischer (la Sorcière/la Servante), Jean-Philippe Lafont (Pierre) et Diana Montague (Gertrude). Photo : (c) Patrice Nin, Théâtre du Capitole de Toulouse
A l’instar de Mariame Clément au
Palais Garnier, Andreas Baesler place l’action dans un appartement bourgeois,
avec décors et costumes de l’époque Biedermeier, mais aux tonalités désuètes.
Dans ce triste espace, la mise en scène suscite la sinistrose, confortée aux
saluts par les visages renfermés des scénographes, qui forment un saisissant
contraste avec ceux souriants des membres de la distribution.
Engelbert Humperdinck (1854-1921), Hänsel et Gretel. Silvia La Muela (Hänsel) et Vannina Santoni (Gretel). Photo : (c) Patrice Nin, Théâtre du Capitole de Toulouse
Insistant sur ce que doit Humperdinck
à Wagner, le metteur en scène allemand Andreas Baesler développe une action dans
le cours de l’ouverture : un huissier et ses assistants saisissent les
biens de la famille d’Hänsel et Gretel, leur laissant étrangement le piano,
mais emmenant deux grands portraits de Richard Wagner et de sa femme Cosima qui
sont décrochés du mur du fond. Une lumière grise éclaire un terne Noël, portée
sur des sapins poussiéreux, tandis que la maison de la sorcière est réduite à
l’état de maquette déposée au milieu de la demeure des petits héros. Du coup,
la magie ne fonctionne pas, de bout en bout.
Engelbert Humperdinck, Hänsel et Gretel. Silvia La Muela (Hänsel), Vannina Santoni (Gretel) et Jeannette Fischer (la Sorcière). Photo : (c) Patrice Nin, Théâtre du Capitole de Toulouse
Heureusement, dans la fosse, le chef leipzigois Claus Peter Flor dirige avec flamme et gourmandise cette partition foisonnante, sollicitant un orchestre flamboyant, en dépit de quelques approximations, notamment du premier violon dans le beau solo du troisième acte. La distribution est sans faiblesse, malgré un Jean-Philippe Lafont, père d’Hänsel et de Gretel par trop sonore et emphatique mais dont l’articulation est un modèle. Vannina Santoni est une Gretel lumineuse à la voix juvénile mais déterminée et autoritaire qui tient au collet son frère Hänsel, interprété avec élan par Silvia de La Muela, à la voix plus mûre. Souvent confié à des cantatrices à la voix usée, la sorcière est cette fois véritablement chantée par Jeannette Fischer, qui apparaît bien triste et un peu perdue dans la scène pourtant au centre de l’action qui traîne en longueur. La Gertrude de Diana Montague est un peu effacée, mais la voix est si belle que l’on regrette la brièveté du rôle, tandis que Khatouna Gadelia, marchand de sable/rosée, complète dignement la troupe.
Bruno Serrou
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