Paris, Opéra de Paris-Bastille, lundi 30
décembre 2013
Philippe Jordan. Photo : DR
Tandis
que toutes les formations parisiennes se pliaient à la traditionnelle trêve des
confiseurs pour prendre quelque repos, à l’instar des footballeurs et autres
sportifs, l’Orchestre de l’Opéra national de Paris, déjà fort occupé dans ses
deux salles par les représentations lyriques et chorégraphiques maison, a
proposé l’avant-veille du 1er janvier 2014 un concert avec son Chœur. La salle était archi-comble, démontrant ainsi combien Paris n’est pas
si désert qu'on le dit en période de fêtes de fin d’année, et le public présent a pu côtoyer le
directeur désigné de l’Opéra de Paris, Stéphane Lissner, qui doit prendre ses
fonctions dans le courant ce nouveau millésime.
Au
programme, une œuvre dont le titre résonnait à l’esprit du public comme une
lueur d’espérance, arrivé au terme d’une année 2013 dominée par la sinistrose
et l’angoisse du lendemain. La Symphonie
n° 2 en ut mineur (1893-1894) de Gustav Mahler commence en effet sur une monumentale
marche funèbre tendue comme un arc titubant en cinq sections intitulée Totenfeier (Cérémonie funèbre) que Mahler composa parallèlement à sa Symphonie n° 1, en 1888, et se concluant
en apothéose sur un lumineux finale composé sur un poème de Friedrich Gottlieb Klopstock
(1724-1803), Auferstehung (Résurrection) que Mahler entendit lors
des funérailles de Hans von Bülow, en février 1894, les deux volets extrêmes
étant réunis par trois mouvements ouvrant peu à peu sur la lumière. Le centre
de la partition est le bref mais sublime Urlicht
(Lumière originelle) pour mezzo-soprano et orchestre, « Ô rose rouge :
/ l’homme est dans la misère la plus grande, / l’homme est dans la plus grande
souffrance / ah, combien je préfèrerais être au ciel !… »
Philippe Jordan et l'Orchestre de l'Opéra national de Paris, à l'Opéra-Bastille. Photo : DR
A la
tête d’un Orchestre de l’Opéra national de Paris aux sonorités de braise, dont
l’homogénéité s’est imposée peu à peu, après un Allegro maestoso initial un peu trop haché, Philippe Jordan a donné de
la Résurrection une lecture au
cordeau, serrant les tempi tout
en maintenant une souplesse qui lui aura permis d’éviter pathos et
emphase, pour instiller à l’œuvre l’élan de la jeunesse, mais aussi virulence,
ampleur, onirisme et éclat. Dans l’Urlicht, l’excellente mezzo-soprano
bavaroise Michaela Schuster entendue en 2012 à l’Opéra de Paris-Garnier dans Capriccio de Richard Strauss (Clairon) a
magnifié sa prestation de son timbre moelleux et son nuancier
extraordinairement expressif. La soprano allemande Julia Kleiter lui a donné
une réplique chaleureuse dans le finale, où le Chœur a su se montrer à la
hauteur de la vision du chef, cohérent et engagé à souhait.
Bruno Serrou
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