Succédant à son fondateur Gaëtan
Puaud en 2019, Bruno Messina poursuit la dynamique du Festival Messiaen qui
consiste à célébrer l’œuvre du maître et de ses élèves tout en donnant une
large place à la création avec une politique de commandes volontariste. Plus
d’une quarantaine de partitions sont de l’initiative du festival. Parmi elles,
des pages de Gilbert Amy, Franck Bedrossian, George Benjamin, Pierre Boulez,
Jean-Luc Hervé, Tristan Murail, Frédéric Pattar… Cette année, deux compositeurs
sont à l’honneur, Philippe Manoury, figure centrale de l’édition, et son aîné
Michel Fano, homme discret, proche de Pierre Boulez qu’il connut dans la classe
d’Olivier Messiaen, compositeur peu prolixe mais au talent universel. Manoury,
qui l’admire, dit de lui qu’il a introduit l’opéra dans le cinéma.
« J’aime ses documentaires animaliers, la façon dont il y magnifie le son
de la nature qui devient avec lui musique. »
Ecrivain - il a entre autres
signé avec le poète Pierre-Jean Jouve le remarquable ouvrage sur Alban Berg Wozzeck ou le Nouvel Opéra -, cinéaste
proche de la Nouvelle vague - il a notamment réalisé les films animaliers Le Territoire des autres, La Griffe et la Dent, et coproduit Hiroshima mon amour et L’Année dernière à Marienbad d’Alain
Resnais -, auteur de musiques de film - Jean-Pierre Mocky, Jean Rouche et
surtout Alain Robbe-Grillet initiateur du Nouveau roman -, né à Paris le 9
décembre 1929, tôt épris de musique au contact de la pianiste-pédagogue Blanche
Selva, marqué par la découverte Salle Favart de Pelléas et Mélisande de Debussy en 1942, gagnant ses premiers
cachets comme pianiste d’Henri Salvador mais avant tout éminent spécialiste du
montage son - il dirige pendant sept ans le département Son de la Fémis -,
Michel Fano est l’un des adeptes les plus engagés de l’avant-garde.
« M’ennuyant dans la classe de Tony Aubin, j’ai voulu entrer dans celle de
Messiaen. Je savais où elle était et qu’il enseignait à 16h30… Je m’y rends à l’heure
dite, je pousse la porte et j’entends l’ouverture de Don Juan de Mozart merveilleusement jouée par cet homme qui m’est apparu
entre deux chandeliers qui éclairaient la partition. Je l’écoute parler de
Mozart ; je l’écoute surtout jouer. D’un coup, le voile se déchire et j’ai
l’épouvantable impression d’avoir passé 10 ans à ne rien faire, que la musique
est là et que c’est un domaine que je ne connais pas. »
Après avoir produit quelques
pièces dans les années 1950, dont l’Etude
pour 15 instruments qui fit scandale à sa création au Domaine musical, il
revient à la composition au tournant des années 2000. « Je n’ai pas
beaucoup composé. Le poids de Boulez... A la création de mon Etude, j’avais 25 ans, j’étais malléable. Il m’a fallu tuer
le frère aîné. J’ai mis du temps, puisque j’ai dû attendre l’âge de 65 ans pour
avoir enfin l’envie profonde d’y retourner. »
Bruno Serrou
23/07-1er/08. www.festival-messiaen.com.
Philippe Manoury est présent tout le festival, Michel Fano du 27 au 30/07. A
voir Michel Fano : https://entretiens.ina.fr/musiques-memoires/Fano/michel-fano
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