Oui, la musique symphonique britannique
existe bel et bien. Son champion a pour nom Sir Ralf Vaughan Williams
(1872-1958). Injustement négligé en France, ce dernier composa neuf symphonies
entre 1910 et 1958, n’attribuant néanmoins de numéro qu’aux deux dernières, et en
dotant quatre autres d’un titre. Sir Adrian Boult (1889-1983), l’un des plus
grands chefs d’orchestre de sa génération, a sa vie durant dirigé avec passion
cette musique, l’imposant partout où il le pouvait. Les deux hommes s’étaient
rencontrés à l’Université d’Oxford entre 1908 et 1912. Boult y avait notamment
chanté dans le chœur de la deuxième exécution de la première symphonie de
Vaughan Williams, A Sea Symphony, qui
a également été la première œuvre qu’il a dirigée comme chef professionnel,
avec le London Symphony Orchestra. Par la suite, il créera les Troisième, Quatrième et Sixième Symphonies, et Vaughan Williams lui
dédiera son ballet Job.
Boult enregistra nombre d’œuvres de Vaughan
Williams à plusieurs reprises, dont deux intégrales des symphonies : la
première dans les années 1950 (Symphonies
1 à 8 pour Decca et, après la
mort du compositeur, la n° 9 pour
Everest) avec le London Philharmonic Orchestra, la seconde partagée entre le
London Philharmonic Orchestra et le New Philharmonia Orchestra pour EMI. Cet
éditeur a choisi de réunir en un gros coffret de treize disques ces ultimes
versions, captées entre 1967 et 1975. Mais il s’y trouve également des
enregistrements des années 1940 et 1950, comme le Concerto pour violon et orchestre avec Yehudi Menuhin, Flos Campi avec William Primrose à l’alto
solo et la version pour chœur de la Sérénade
à la Musique. Le cœur du coffret est cependant
constitué par les symphonies. S’agissant du second cycle réalisé par Boult au
disque, la longue expérience du chef britannique des œuvres de son ami et
compatriote s’impose tout au long de ces pages comme toujours plus saisissantes,
que ce soit dans la puissance implacable de la Quatrième, le développement extraordinaire de limpidité de la Cinquième ou le respect des aspirations
symphoniques de la Sinfonia Antartica
sans annihiler pour autant l’essence programmatique de l’œuvre.
Mais ce qui est peut-être la grande réussite
de ce coffret, et sans doute le plus grand des enregistrements des dernières
années de la carrière de Boult, est son interprétation de The Pilgrim’s Progress, l’un des six opéras de Vaughan Williams,
qui aura mis trente ans pour en arriver à bout, et dont il s’agit ici du premier
enregistrement complet. Quelle que soit sa portée dramaturgique, la partition
réunit quelques-unes des plus belles pages du compositeur, tandis que Boult
donne à la partition entière une ampleur unique. Son approche de Job est tout aussi exemplaire, à l’instar
des interprétations de la Fantaisie sur
un Thème de Thomas Tallis, de la version seize voix de la Sérénade à la Musique et de In the Fen Country, Mais tout serait à
citer tant les réussites sont nombreuses...
Le coffret que propose EMI est un
veritable trésor pour qui souhaite découvrir deux acteurs majeurs de la musique
britannique du XXe siècle, Sir Adrian Boult et Sir Ralf Vaughan Williams, l’un
des grands symphonistes du siècle passé. Les perles sont innombrables, et les solistes
sont parmi les plus grands des années 1940 à 1975 (Yehudi Menuhin et William Primrose
déjà cités, Sheila Armstrong, Margaret Price, Norma Burrowes, Ian Partridge,
Kenneth Bowen, John Noble, Raimund Herincx, John Shirley-Quirk, Robert Lloyd…).
Bruno
Serrou
13 CD EMI 50999 9 03567 2
8 Stereo/Mono ADD
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