Genève (Suisse). Grand-Théâtre / Théâtre des Nations. Mardi 12 septembre 2017
Grand-Théâtre de Genève. Gioacchino (1792-1868), Il Barbieri di Seviglia. Photo : DR
Annonciateur des thèmes de la Révolution de 1789, le personnage de Figaro est né de
l’imaginaire de Beaumarchais, qui en fit le personnage central d’une trilogie
dans laquelle les compositeurs se sont plus à puiser. Le Grand-Théâtre de
Genève en propose en ce moment une production venue de Cardiff
Commencé en 1772 par le Barbier de Séville, terminé en 1792
par La Mère coupable qui s’inspire du
Tartuffe de Molière, la trilogie de
Beaumarchais qui commence à Séville par la conquête de Rosine par le Comte
Almaviva avec l’aide du barbier Figaro et se conclut vingt ans plus tard par
l’exil du comte et de sa femme et le divorce de Figaro d’avec Suzanne, la
trilogie est entré au théâtre lyrique dès 1782 avec Le Barbier de Séville de Giovanni Paisiello. Quatre ans plus tard,
Mozart s’emparait du Mariage de Figaro avec le librettiste Lorenzo da Ponte
pour composer son chef-d’œuvre Les Noces
de Figaro, tandis que Rossini reprend en 1816 Le Barbier de Séville pour en faire son opéra le plus célèbre.
Seule La Mère coupable est négligé,
sans doute à cause de son sujet, qui devra attendre la libération des mœurs,
Darius Milhaud mettant la pièce en musique en 1966.
Grand Théâtre de Genève, Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), Le Nozze di Figaro. Photo : DR
Si la trilogie présentée à Genève
a choisi le Barbier de Rossini et les Noces de Mozart, ce n’est pas
Milhaud qui a été retenu pour Mère
courage, ni celle d’Inger Wikström (2006) ni même Thierry Pécou créé à
Rouen en 2010. C’est à la compositrice russo-britannique Elena Langer (née en
1974) que l’Opéra gallois a commandé Figaro
Gets a Divorce créé en février 2016, sur un livret de David Pountney
amalgamant La Mère courage de
Beaumarchais et son adaptation en 1936 par le dramaturge austro-hongrois Odon
von Horváth
(1901-1938) sous le titre Figaro divorce.
Ce dernier volet du triptyque ajoute le sombre personnage du Commandant, sorte
d’agent double et de milicien, ainsi qu’Angelika, fille adultérine du Comte et
Barberine, et son amoureux, Serafin, fils adultérin de de la Comtesse et
Chérubin. La partition de Langer à la riche orchestration qui inclut piano et
accordéon, tient autant de Britten que de Puccini et de Berg, du jazz et du
tango, tandis que le rôle de Chérubin devient contre-ténor.
Grand-Théâtre de Genève, Elena Langer (née en 1974), Figaro Gets a Divorce. Photo : DR
Donné dans l’ordre des pièces
originelles, chaque opéra est confié à une équipe artistique différente. Seul
point commun, la scénographie de Ralph Koltaï et les costumes de Sue Blane.
Pour unifier le cycle, les trois opéras se déroulent dans les mêmes décors,
tandis que la costumière s’est pliée aux désirs des trois metteurs en scène.
Sam Brown signe une mise en scène foutraque au premier acte et plus claire au
second. La distribution, inégale, est animée par Jonathan Nott, que l’on
n’attendait pas ici, et son Orchestre de la Suisse romande, qui mettent
littéralement le feu à ce Barbier.
Dans les Noces, la troupe est sans
faille. Ildebrando D’Arcangelo est un Comte époustouflant à qui le Figaro de
Guido Loconsolo tient crânement tête, Nicole Cabell, Regula Mühlemann, Avery
Amereau, Monica Bacelli, Seraina Perrenoud
sont toute de charme et de caractère, le chef Marko Letonja est à la
tête d’un orchestre d’une cohésion saisissante, tandis que la mise en scène de
Tobias Richter est mue par une véritable direction d’acteur. L’équipe de
chanteurs réunie pour Figaro Gets a
Divorce est tout aussi convaincante, avec entre autres le Comte altier et
brutal de Mark Stone, la Suzanne ardente de Marie Arnet, l’insolence du
Chérubin d’Andrew Watts, l’impressionnant Major d’Alan Oke, tandis que Justin
Brown et le Basel Sinfonietta donnent éclat et fluidité à l’orchestration de
Langer.
Bruno Serrou
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