Einojuhani Rautavaara (1928-2016). Photo : (c) Ari Korkola
Compositeur parmi les
plus prolifiques et populaires de Finlande, Einojuhani Rautavaara est mort
mercredi 27 juillet à son domicile d’Helsinki des suites de complication médicales
après une intervention chirurgicale. Il avait 87 ans.
Né à Helsinki le 9 novembre 1928,
Einojuhani Rautavaara est à la suite de Jean
Sibelius l’un des compositeurs finlandais les plus réputés dans le monde. Il
est également un pédagogue influent, nombre de compositeurs finlandais des générations
qui suivent la sienne ayant été ses élèves à l’Académie Sibelius d’Helsinki, où
il a enseigné pendant trente-trois ans, de 1957 à 1990. Rautavaara est un compositeur
prolifique, écrivant dans une grande variété de formes et de styles. Après
avoir expérimenté les techniques sérielles, qu’il n’observa jamais
strictement, sa personnalité complexe et polymorphe a très vite rendu sa
musique inclassable. Sa nature romantique est à la façon d’Anton Bruckner emprunte
de mysticisme. Depuis le début des années 1980, Rautavaara s’est rapproché du
mouvement dit « post-moderne » et dans le néoromantisme mystique dans
lesquel les éléments les plus inventifs et les plus traditionnels sont étroitement
imbriqués les uns aux autres.
Einojuhani Rautavaara avec à sa droite son élève Esa-Pekka Salonen, en 1986. Photo : DR
Elève d’Aarre
Merikanto à l’Académie Sibelius de 1948 à 1952, remarqué par Jean Sibelius en
personne, il se rend en 1955, sous l’impulsion de ce dernier, aux Etats-Unis où
il entre à la Juilliard School de New York, ainsi qu’à l’Académie d’été de
Tanglewood avec Roger Session et Aaron Copland. Après deux années en Amérique
du Nord, il se rend en Suisse, à Ascona pour travailler avec Vladimir Vogel et
à Cologne avec Rudolf Petzold. A son retour à Helsinki, il commence à enseigner
à l’Académie Sibelius, puis devient archiviste de l’Orchestre Philharmonique de
1959 à 1961, recteur de l’Institut Käpylä de Musique, avant de réintégrer
l’Académie Sibelius comme professeur de 1966 à 1976, puis, de 1976, d’y
enseigner la composition jusqu’en 1990. Parmi
ses élèves figurent Magnus Lindberg, Kalevi Aho, Olli Mustonen, Esa-Pekka
Salonen…
Einojuhano Rautavvara en 2014. Photo : (c) Archives AFP
C’est en 1953, avec A Requiem in Our Time pour cuivres avec
lequel il remporte le Concours de composition Thor Johnson de Cincinnati, qu’il
attire l’attention. Notamment celle de Sibelius. Suivront plus de cent
cinquante œuvres, dont plusieurs dizaines de partitions pour orchestre parmi
lesquelles huit symphonies, la dernière, titrée The Journey, datant de 1999.
Il est aussi l’auteur de quatorze concertos, dont trois pour piano et deux pour
violoncelle, ainsi que de Daughter of the
Sea pour soprano, chœur et orchestre, des pages pour orchestre à cordes,
tandis que parmi ses pièces de musique de chambre il convient de citer quatre Quatuors à cordes (1952-1975), deux Sonates pour piano (1969-1970), deux Sonates pour violoncelle (1972 et 1991),
une pour basson (1970), une autre pour flûte et guitare (1975) et, plus
récemment, Summer Thoughts pour
violon et piano (2008) et deux Quintettes
à cordes (1995 et 2013). Rautavaara est également un compositeur d’opéra
fécond avec huit ouvrage lyriques conçus entre 1957 et 1996 : The
Mine (1957-1960, révisé en 1962), The
Myth of Sampo (1974/1982), Thomas
(1982-1985), The House of the Sun
(1989-1990), The Gift of the Magi
(1993-1994), Aleksis Kivi
(1995-1996), Vincent et Raspoutine (2001-2003). Son catalogue
compte quantité de pages chorales pour chœurs mixtes, de femmes et d’hommes. Parmi
ses œuvres les plus significatives, les Symphonies
n° 5 et n° 7 « Angel of Light », le Cantus articus op. 61 (1971-1972),
sous-titré concerto pour oiseaux et
orchestre, qui se présente telle une cantate où les chanteurs sont non pas
des femmes et des hommes mais des oiseaux comme le pouillot fitis, la sterne
arctique, le cygne chanteur, le harle bièvre, le canard chipeau, le chevalier
bargette, la bergeronnette printanière, le fuligule morillon ou le phragmite
des joncs. Bien que peu audacieuse, cette page est probablement la partition la
plus célèbre de son auteur.
Bruno Serrou
Le mysticisme très brucknerien de Rautavaara se tourne vers une conscience élargie de la nature au sens de ce qui environne. C'est un compositeur qui devrait être encensé par les «Verts» si ceux possédaient un vrai sens de politique culturelle. D'autres que Rautavaara se sont aussi imprégnés d'une nature dont ils expriment les lignes infinies – comme Arvo Pärt par exemple. Cela va merveilleusement avec notre siècle, une grande musique comme un reflet de paysages naturels dans lesquels l'auditeur retrouve les dimensions d'une autre conscience. On n'est pas loin de la méditation. C'est d'ailleurs un sens de l'écoute qui a été assez peu exploré.
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