Paris. Opéra de Paris-Bastille. Jeudi 7 juillet 2016
Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris
Retour à l’Opéra de Paris-Bastille
trois ans après sa première présentation d’une production qui suscita en
octobre 2013 de violentes réactions de rejet, l’Aïda de Giuseppe Verdi selon Olivier Py passe cette fois sans provoquer
de réaction particulière, du moins jeudi, trois semaines après la première
représentation, elle aussi conspuée. Ses costumes mêlant troisième Empire (pour
les Egyptiens/Autrichien), treillis militaires contemporains et habits informes
(pour les Ethiopiens/Italiens) et décors amovibles aux ors miroitant lustrés de
près aveuglant le spectateur durant leur changement de position, rendent cette
production clinquante, sans pour autant porter atteinte à la lisibilité de l’intrigue.
Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris
Je ne reviendrai donc pas sur les
qualités et sur les défauts de cette production longuement présentée à l’occasion
de son entrée sur la scène de l’Opéra Bastille en 2013 sur ce blog (voir ici :
http://brunoserrou.blogspot.fr/2013/10/une-aida-toute-en-or-suscite-un.html).
En revanche, la distribution a complètement changé et s’avère beaucoup plus convaincante
que la précédente. A tel point d’ailleurs que la direction d’acteur se révèle
plus efficace qu’antan, les chanteurs étant plus adaptés à leurs rôles que
leurs prédécesseurs. Après un premier air difficile à surmonter, le célèbre « O céleste Aïda », le ténor letton
Aleksandrs Antonenko est un Radamès plutôt rustique, mais le timbre est de
bronze, sombre et opulent, la voix d’airain. La soprano ukrainienne
Liudmyla Monastyrska est une Aïda d’une aisance vocale impressionnante, avec
des aigus éclatants, mais son personnage est distant, sans réel consistance,
tandis la diction est aléatoire. La mezzo-soprano italienne
Daniela Barcellona est une Amnéris solide, aussi émouvante que tranchante.
Continuellement vêtu de pompeux habits sacerdotaux, la basse coréenne Kwangchul
Youn est un Ramfis à la voix chevrotante. Timbre somptueux aux harmoniques florissantes,
le baryton ukrainien Vitaliy Bilyy propose en Amonasro un père abusif mais
humain.
Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris
Succédant à Philippe
Jordan au pupitre de cette Aïda, fidèle invité de l’Opéra de Paris dans le
répertoire romantique italien, le chef israélien Daniel Oren se délecte des
somptueuses sonorités de l’Orchestre de l’Opéra de Paris qu’il applaudit à
chaque fin d’acte. Sa direction est précise et lyrique, mais manque de nuances.
Il tire néanmoins de la remarquable phalange parisienne un modelé lustré au
cordeau, exalté par des tensions dramatiques, malgré un duo final manquant de
tendresse et de poésie immatérielle il est vrai difficile à atteindre. Les
fanfares de la scène du triomphe ne sont plus à l’arrière-plan, résonnant
depuis le fond du plateau à travers des haut-parleurs, contrairement à 2013,
mais intégrés à la scénographie, ce qui n’affecte plus l’efficacité sonore de
ce passage trop souvent dénaturé dans les Aïda
de plein-air. Le Chœur de l’Opéra est quant à lui parfaitement en place et son
nuancier est d’une richesse impressionnante.
Bruno Serrou
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire