Epris autant de poésie que de musique, jouant de l’instrument le plus
humain qui soit, le jeune violoncelliste Yan Levionnois réunit ses trois
passions dans un disque onirique qu’il a intitulé Les Illuminations. Il
s’agit du vingt-quatrième disque d’un label qui tire son nom d’un poème de Paul
Verlaine, Les Belles écouteuses
« Fou de littérature, j’adore
raconter des histoires, voyager d’une œuvre à l’autre. Je ne peux concevoir mes
programmes autrement. J’ai l’âme d’un conteur. J’entends créer une
cohérence entre les œuvres. » Ainsi se présente Yan Levionnois. Né en 1990
dans une famille de musiciens, fils d’Eric, violoncelle solo de l’Orchestre
Philharmonique de Radio France, et Hélène Levionnois, altiste comme son frère
aîné Ludovic, Yan s’est rapidement imposé comme l’un des violoncellistes les
plus doués de sa génération. Lauréat des Concours Reine Elisabeth et
Rostropovitch, Yan Levionnois se distingue par sa curiosité qui le conduit à
multiplier ses expériences artistiques. Ce qu’il a commencé à faire dès ses
études, débutées avec ses parents à Tours à sept ans, puis à Paris, au CNSMDP où
il est l’élève de Philippe Müller et de Marc Coppey, puis à Oslo avec Truls
Mork, enfin à la Juilliard School de New York avec Timothy Eddy. Riche d’un tel
cursus, le jeune Yan ne pouvait que s’intéresser à la création contemporaine,
travaillant avec des compositeurs comme Jonathan Harvey, Krystof Maratka ou
Eric Tanguy, jouant des œuvres solos dès seize ans en tournées internationales organisées
par l’Alliance française. « Le contact avec les compositeurs me fascine, s’enthousiasme-t-il,
et j’éprouve les plus grandes émotions lors des concerts de
création. »
Chef de pupitre de l’ensemble Les Dissonances, aimant à se produire autant en soliste qu’en chambriste, il est depuis l’été 2019 le violoncelliste du Quatuor Hermès, qui est désormais sa priorité. « Le quatuor m’est devenu vital, car le travail y est extrêmement profond, et l’osmose est telle que le regard des partenaires est primordial si l’on tient à obtenir une cohésion totale, le quatuor étant un instrument unique constitué de quatre individualités qui visent le même but, un son indivisible et spécifique. Ce qui nous conduit à travailler ensemble tous les jours. » Ainsi, l’absence frustrante du concert public est compensée par ses partenaires avec qui travaille à fond les œuvres d’un répertoire d’une richesse infinie. « J’ai pu jouer dans des festivals l’été dernier, et entre septembre et novembre, rappelle-t-il, puis tout s’est annulé du jour au lendemain tout a été annulé... Le plus terrible est de ne pas savoir jusqu’à quand nous serons privés de concert, faut-il ou non nous préparer ? En tout cas il nous faut impérativement agir dans la perspective d’une reprise en février pour pouvoir retrouver le public sans attendre... Je table sur février… Mais rien n’est moins sûr ! »
Depuis 2013, Yan Levionnois a
enregistré une quinzaine de disques. Celui qui vient de paraître, Les Illuminations,
est le fruit de quatre années de travail et de tournées avec ce programme qui
réunit les Trois Suites pour violoncelle
seul de Benjamin Britten et une large
sélection de poèmes du recueil d’Arthur Rimbaud Les Illuminations.
« Sans connaître à l’époque le cycle de dix mélodies du même titre de
Britten, lorsque j’ai abordé les Suites
du compositeur britannique, je lisais le cycle de rimbaldien, ressentant immédiatement
une filiation entre le poète et le compositeur, particulièrement pour ce qui
concerne le rythme et la musique des mots. » Au point qu’en soixante-dix
minutes, Yan Levionnois mêle étroitement jusqu’à la fusion musique et poésie
qu’il joue et dit avec des accents de vérité qui ne peuvent qu’émouvoir.
Bruno Serrou
2CD « Les Illuminations,
Britten/Rimbaud ». Les Belles Ecouteuses
C/o Quotidien La Croix
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