Inge Borkh (1917/1921-2018). Photo : DR
Son extraordinaire tempérament dramatique
au service d’une voix rayonnante, chaleureuse, impériale ont imposé Ingeborg
Simon alias Inge Borkh comme l’une des tragédiennes les plus saisissantes du
théâtre lyrique. Il faut dire que la soprano dramatique allemande, authentique chanteuse-actrice
née à Mannheim le 26 mai 1921 - ou 1917 - de père juif, naturalisée suisse après
s’être installée à Genève en 1933 avec ses parents, se destinait tout d’abord à
une carrière de comédienne, qu’elle a étudié au Burgtheater de Vienne auprès de
Max Reinhardt, avant de faire ses débuts à Linz en 1937 et d’intégrer la troupe
de l’Opéra de Bâle dès l’année suivante, après l’Anschluss. S’entrainant aussi
à la danse, elle se rend finalement à Milan pour étudier le chant chez Muratti,
et fait ses débuts en 1940 au Théâtre municipal de Lucerne dans le rôle d’Agathe
du Freichütz de Weber.
Inge Borkh et Dimitri Mitropoulos à Salzbourg en 1957. Photo : DR
Jusqu’en 1951, elle se produit
sur les scènes de Lucerne, Bâle et Zürich, avant de commencer une immense
carrière internationale à Munich et à Berlin, après le succès de la création en
langue allemande du Consul de Gian
Carlo Menotti à Bâle. En 1952, elle est Freia et Sieglinde dans le Ring dirigé par Joseph Keilberth et mis
en scène par Wieland Wagner au Festival de Bayreuth, tandis que ses apparitions
à Vienne, Hambourg, Stuttgart constituent autant d’événements. Elle est invitée
à Barcelone, Lisbonne et Naples. En 1954, son interprétation d’Eglantine dans l’Euryanthe de Weber au Mai Musical
Florentin est saluée par une presse unanime. Un an plus tard, elle crée au
Festival de Salzbourg le rôle de Cathleen dans la Légende irlandaise de Werner Egk.
Inge Borkh dans le rôle-titre de Salomé de Richard Strauss au Metropolitan Opera de New York en 1958. Photo : DR
Invitée par l’Opéra de San
Francisco depuis 1953, par la Scala de Milan, Covent Garden de Londres et
l’Opéra d’Etat de Berlin, elle s’impose comme l’interprète des grands sopranos
dramatiques de Wagner et de Richard Strauss, Salomé, rôle avec lequel elle fait
ses débuts au Metropolitan Opera de New York en 1958, le rôle-titre d’Elektra, qu’elle chante pour la première
fois en 1957 au Festival de Salzbourg, ainsi qu’Hélène dans Hélène d’Egypte. Au Met, elle sera une
pathétique Teinturière de la Femme sans
ombre du même Strauss, notamment lors de la réouverture en 1963 de l’Opéra
de Munich. Elle est aussi d’immenses Aïda et Lady Macbeth chez Verdi, Tosca et
Turandot de Puccini, Leonore de Fidelio
de Beethoven, Médée de Cherubini,
Clytemnestre dans Iphigénie et Aulide
de Gluck, Antigone de Karl Orff… Elle se retire de la scène lyrique en 1973
après sept représentations d’Elektra
en Italie, et fait ses adieux au théâtre à l’âge de 71 ans, au Festival de
Munich 1988. Elle continue néanmoins à travailler comme diseuse, chansonnière
et professeur d’art dramatique.
Inge Borkh au côté de Brigitte Fassbänder à l'Opéra de Munich. Photo : (c) Archives de l'Opéra d'Etat de Bavière
Inge Borkh laisse de trop rares
enregistrements, mais ils sont tous autant de jalons dans l’histoire du disque
et de l’interprétation : Salomé
et Elektra au Festival de Salzbourg
1957 dirigés par Dimitri Mitropoulos (Orfeo et Nuova Era), Elektra avec Karl Böhm à l’Opéra de Dresde (DG), La Femme sans ombre avec Joseph Keilberth à Munich (DG), Turandot à Rome avec Alberto Erede
(Decca), Tove dans les Gurrelieder de
Schönberg avec Rafael Kubelik (DG), Iphigénie
en Aulide avec Böhm à Salzbourg en 1962 (Orfeo), Euryanthe de Weber avec Carlo Maria Giulini à Florence (Warner), Mona Lisa de Max von Schillings à Berlin
en 1953 avec Robert Heger (Preiser Records), Antigone d’Orff avec Ferdinand Leitner (DG), un disque d’extraits
de Salomé et d’Elektra dirigé par Fritz Reiner à Chicago (RCA/Sony Classical), Tiefland d’Eugen d’Albert avec Hans
Löwlein à Bamberg (DG), dont beaucoup sont malheureusement difficilement
accessibles.
Inge Borkh est morte ce dimanche 26 août à Genève.
Inge Borkh est morte ce dimanche 26 août à Genève.
Bibliographie :
Nicht nur Salome und Elektra : Inge Borkh
im Gespräch mit Thomas Voigt et Ich komm vom Theater nicht los...:
Errinerungen und Einsichten
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