La Côte-Saint-André (Isère), Eglise Saint-André et Chapiteau de la Cour
du Château Louis XI, vendredi 28 août 2015
La Vallée du Rhône et le Massif Central au soleil couchant vus depuis la terrasse du Château Louis XI de La Côte-Saint-André. Photo : (c) Bruno Serrou
Ceux parmi les festivaliers de la
Côte-Saint-André qui n’aiment pas le piano, c’était hier un jour sans. Mieux
valait en effet pour eux s’abstenir et opter pour une journée de relâche et d’en
profiter pour faire du tourisme sur les pas de leur compositeur favori, Hector
Berlioz, qui composa fort peu pour le clavier, à l’exception de quelques
mélodies très tôt orchestrées néanmoins. Même du côté de Napoléon, héros
associé à Berlioz en cette année du bicentenaire des Cent Jours, de la défaite
de Waterloo et de l’exil forcé à Sainte-Hélène, il ne se trouve de pianiste que
dans la troisième génération, avec le petit-neveu Louis-Napoléon Bonaparte
(1856-1879), que l’on dit doué pour le piano et pour le dessin…
Jean-François Heisser en l'église Saint-André. Photo : (c) Bruno Serrou
L’Espagne de Jean-François Heisser
Les trois concerts de vendredi
étaient en effet entièrement dévolus au piano. Rien de berliozien, ni de
napoléonien, bien sûr. Quoi que, en rapport avec ce dernier, le récital de
l’après-midi menait l’auditeur sur les traces plus ou moins lointaines de
l’Empereur, qui comme l’on sait, laisse de très mauvais souvenirs
outre-Pyrénées. Conséquences collatérale des massacres qu’il y perpétra durant
la « Guerre d’indépendance espagnole » qui s’éternisa pendant
cinq ans, de 1808 à 1813 et qui s’acheva sur la victoire coalisée de Vitoria
commandée par Wellington qui inspira à Beethoven l’œuvre entendue mercredi
(voir http://brunoserrou.blogspot.fr/2015/08/festival-berlioz-vii-nicholas-angelich.html).
Cette tragique épopée a été notamment immortalisée par Francisco Goya
(1746-1828), dont plusieurs tableaux parmi ses plus célèbres s’en inspirent,
comme El Dos de Mayo et El Tres de Mayo 1808 (1814) et une série de quatre vingt cinq gravures réunies sous
le titre les Désastres de la guerre
réalisées entre 1810 et 1820, guerre qui coûta à l’Espagne trois cents mille
morts ou disparus. Parmi les pages retenues par Jean-François Heisser dans son
récital intitulé « Sur les traces de l’Espagne », figuraient deux des
sept pièces que le peintre inspira à Enrique Granados (1876-1916) - une
septième, El pelele (Le mannequin)
sous-titrée « Scène goyesque » date de 1914 -, réunies sous le titre Goyescas (Goyesques) : les deuxième, Coloquio
en la reja (Dialogue en la prison) dédiée à Edouard Risler, et troisième, El fandango de Candil (Le fandango à la chandelle) dédiée à
Ricardo Viñes.
Francisco Goya (1746-1828), El Tres Mayo 1808 (1814). Photo : DR
Après le chef d’orchestre dans la
création de l’oratorio Nabulio la
veille (voir http://brunoserrou.blogspot.fr/2015/08/festival-berlioz-viii-berlioz-et.html)
dans la Cour du Château Louis XI, c’est le pianiste Jean-François Heisser qui
s’est exprimé ce vendredi en l’église Saint-André. Au sein d’un très vaste
répertoire, qui court de Jean-Sébastien Bach à Philippe Manoury, Heisser voue
une réelle passion pour la musique espagnole qu’il contribue, sur les traces de
son aînée espagnole Alicia de Larrocha (1923-2009), à répandre largement auprès
du grand public par les nombreux récitals qu’il donne dans le monde entier et
par ses disques. Le piano espagnol, emprunt des couleurs et particularismes
folkloriques de la péninsule ibérique, est né au tournant des XIXe
et XXe siècle, forgé à l’aune de l’école française, tous les
compositeurs d’outre-Pyrénées ayant fait le voyage à Paris, où ils sont entrés
en contact avec Claude Debussy, Paul Dukas, Maurice Ravel, entre autres, chez
qui ils ont puisé leurs sources sans pour autant anéantir les accents de leur
terroir qu’ils ont su mêler des modes d’expression de la musique française de
leur temps. Ainsi du Catalan Isaac Albéniz (1860-1909), qui fut l’élève
d’Antoine-François Marmontel au Conservatoire de Paris et proche de Vincent d’Indy
et de la Schola Cantorum, où il enseigna un temps. Heisser a choisi
d’interpréter deux de ses quatre Livres constituant sa suite pour piano Iberia (1905-1908), ouvrant son récital
avec le premier livre dédié à l’épouse du compositeur Ernest Chausson constitué
d’un Evocación (Evocation), El puerto de Cadiz (Le port
de Cadix) et Corpus Christi en
Sevilla, qui décrit une procession se déroulant à Séville au rythme des
tambours et qui s’éloigne progressivement, et le concluant avec le troisième,
formé du triptyque El Albaicin décrivant
le quartier gitan de Grenade, El Polo,
nom d’une danse andalouse et d’un quartier populaire de Madrid, et Lavapiès, autre quartier madrilène. Mais
les pages les plus célèbres de ce récital a été la Pantomime et les Deux danses extraites de L’amour sorcier de Manuel de Falla (1876-1946), tandis que les plus
délicates ont été les plus proches de nous, puisqu’extraites de la Música Callada ou Musique du
silence, recueil de vingt-huit pièces écrit en 1959 et 1967 d’après saint
Jean de la Croix de Federico Mompou (1893-1987), compositeur catalan que côtoya
Heisser, qui a donné de morceaux qu’il a sélectionnés une interprétation
ascétique, en soulignant le mysticisme par un jeu particulièrement dépouillé.
C’est d’ailleurs l’idée de dépouillement
qui s'impose dès l’abord à l’esprit du spectateur qui assiste aux récitals de
Jean-François Heisser, tant le pianiste reste immobile devant son clavier,
fermant le plus souvent les yeux comme pour jouer pour lui-même, les mains
courant sur le clavier quasi sans bouger mais les doigts volant au-dessus des
touches en veillant à ne pas les enfoncer tout en exaltant des sonorités de
braise, comme si ces dix doigts étaient autant de pinceaux fouillant et mixant
des couleurs des plus extraordinaires sur une palette de peintre. Tout, en
regardant Heisser jouer, semble facile, naturel, et si l’on regarde le pianiste
de dos, on a l’impression qu’il ne bouge pas et qu’il tire ses sonorités du
plus profond de lui-même, et non pas du coffre du média-piano. Heisser a tout
de l’artiste de la sérénité, tant tout apparaît facile sous ses mains, qui se
croisent et se chevauchent avec un naturel inouï.
Le canon, son serviteur et son amie devant le Château Louis XI de La Côte-Saint-André avant le coup de canon donnant le signal du début des concerts. Photo : (c) Bruno Serrou
Intégrale des Concertos pour piano de Beethoven par
François-Frédéric Guy
François-Frédéric Guy a poursuivi
son « Projet Beethoven » pour la troisième année consécutive
entrepris à La Côte-Saint-André en 2013 avec l’intégrale des trente-deux Sonates pour piano de Beethoven en dix
jours, puis des dix Sonates pour violon
et piano et des cinq Sonates pour
violoncelle et piano en 2014, avec Tedi Papavrami et Xavier Philips, en
attendant peut-être les sept Trio pour
piano, violon et violoncelle et le Triple
Concerto avec ses deux fidèles partenaires, voire la Fantaisie chorale pour piano, chœur et orchestre…
François-Frédéric Guy dirigeant du piano l'Orchestre de Chambre de Paris dans le Concerto n° 4 de Beethoven. Photo : (c) Delphine Warin / Festival Berlioz
Ce n’est pas la première fois
qu’il dirige du piano ces cinq concertos - il se refuse de jouer le
« sixième », adaptation du Concerto
pour violon et orchestre en ré majeur op. 61 que Beethoven réalisa lui-même
et que le pianiste juge sans attrait. Il les a en effet donnés ainsi notamment
avec le Sinfonia Varsovia en juillet dernier à Montpellier dans le cadre du
Festival de Radio France. Cette fois, c’est avec un Orchestre de Chambre de
Paris complètement transcendé qu’il les a interprétés à La Côte-Saint-André,
dans un concert divisé en trois parties, la première avec les Concertos n° 1 et n° 4, la deuxième réunissant les Concertos n° 2 et n° 3,
la troisième avec le seul Concerto n° 5
« l’Empereur ». Un véritable marathon qui n’a pourtant rien d’un
tour de force sous les doigts et la direction vivifiante de François-Frédéric
Guy. Le pianiste français a enregistré ces œuvres en 2010 avec l’Orchestre
Philharmonique de Radio France, dirigé non pas par lui mais par son complice
Philippe Jordan. Il entend d’ailleurs les réenregistrer, cette fois les
dirigeant du piano, et pourquoi pas, s’interroge-t-il, avec l’Orchestre de
Chambre de Paris, qui, avec une des effectifs quasi complètement renouvelés,
est de nouveau sur la pente ascendante. Il est prévu d’ailleurs que le sang
neuf soit complété dans les mois qui viennent, notamment avec le recrutement
d’un corniste jouant aussi d’un instrument naturel, à l’instar des deux
trompettistes qui ont joué sur des trompettes à perces les quatre concertos de
Beethoven auxquels leur instrument est appelé à participer.
François-Frédéric Guy et l'Orchestre de Chambre de Paris. Photo : (c) Bruno Serrou
Concertos pour piano et orchestre n° 1 et n° 4
Encore situé dans la tradition
classique de Haydn et Mozart, le Concerto
n° 1 en ut majeur op. 15 est en fait le deuxième des cinq concertos de
Beethoven. Conçu en 1798, publié en 1801, ce concerto réunit un orchestre
enrichi de deux clarinettes, de deux trompettes et de timbales. Dans la longue
introduction du mouvement initial, l’orchestre énonce d’emblée trois thèmes,
tandis que la cadence a été composée par Beethoven en 1809. Le Largo central reste dans l’esprit de la
variation et de l’improvisation, tandis que le finale est un rondo de sonate. François-Frédéric
Guy en a souligné la grande vitalité, mettant en exergue les déplacements
d’accents rythmiques, l’Orchestre de Chambre de Paris répondant avec justesse à
ses sollicitations et fondant ses timbres à ceux d’un piano riche en timbre et
chantant avec délice.
François-Frédéric Guy et l'Orchestre de Chambre de Paris. Photo : (c) Bruno Serrou
François-Frédéric Guy a enchaîné
le Concerto n° 4 en sol majeur op. 58
sans pause autre que les applaudissements suscités par l’exécution de l’œuvre
qui l’a précédée. Esquissée en 1804, composée en 1806, l’année de la Sonate
« Appassionata », de la Quatrième Symphonie et du Concerto pour
violon e orchestre en ré majeur, créée le 22 décembre 1808 le même soir que les
Cinquième et Sixième Symphonies, cette partition est la plus novatrice de œuvres
concertantes de Beethoven, car elle inaugure un genre qui ira en s’épanouissant
avec Johannes Brahms entre autres, la symphonie avec instrument soliste obligé,
que Beethoven portera dans un premier accomplissement avec le concerto suivant.
C’est le piano qui ouvre l’œuvre, avec quatre accords qui sont immédiatement
repris par l’orchestre, les deux entités dialoguant et se fondant l’un à
l’autre avec une fluidité harmonique, rythmique et formelle exceptionnelle,
supérieurement mise en évidence par François-Frédéric Guy et les musiciens de
l’Orchestre de Chambre de Paris, dont bois et cuivres ont excellé dans leurs soli et répons. La cadence retenue par
François-Frédéric Guy dans ce mouvement est celle écrite par Johannes Brahms. Le
court mais dense et douloureux Andante
con moto central a chanté sous les doigts de François-Frédéric Guy tel une sombre
aria d’opéra dans l’esprit des
mouvements lents des concertos de Mozart, tandis que l’orchestre lui a répondu à
la façon d’un récitatif. Enchaîné attaca,
le Rondo finale a libéré une énergie
vivifiante.
François-Frédéric Guy et l'Orchestre de Chambre de Paris à l'issue du Concerto n° 3 de Beethoven. Photo : (c) Bruno Serrou
Concertos pour piano et orchestre n° 2 et n° 3
Après un long entracte qui a
permis aux festivaliers qui ont assisté aux deux premiers concertos de la
soirée commencée à 19h, de se ravitailler avant la deuxième partie de soirée,
François-Frédéric Guy et l’Orchestre de Chambre de Paris, défaits de ses
clarinettes, trompettes et timbales, ont interprété le Concerto n° 2 en si bémol majeur op. 19, en fait le premier des
cinq écrits par Beethoven, puisqu’il date de 1794-1795, le compositeur le
remaniant une première fois en 1798 après en avoir donné la création à Vienne
le 29 mars 1795, puis une seconde fois en 1801 en vue de sa publication à
Leipzig. L’orchestre expose longuement le premier thème, que reprend brièvement
le soliste, qui présente le second thème, tandis que le développement se fonde
exclusivement sur le premier. La longue cadence fuguée a été écrite par
Beethoven en 1809. L’Adagio est de
forme sonate sans développement, dont le finale est particulièrement expressif.
Le piano ouvre le Rondo final qui
retourne au climat et au style du finale du Concerto
op. 15. François-Frédéric Guy et l’Orchestre de Chambre de Paris ont donné
à cette œuvre sa lumineuse évidence, sa fluidité chaleureuse et sensuelle qui
plonge ses racines dans le classicisme viennois.
François-Frédéric Guy et l'Orchestre de Chambre de Paris. Photo : (c) Bruno Serrou
Esquissé en 1796, achevé en 1802,
peu après que Beethoven eut écrit son Testament
d’Heiligenstadt, contemporain de la Symphonie
« Eroica », le Concerto n°
4 en ut mineur pour piano et orchestre op. 37, seul concerto que Beethoven
ait composé en mode mineur, est un modèle d’équilibre formel et discursif,
associant la virtuosité du pianiste à la densité de l’orchestre et des
dialogues entre les instruments solo du second avec le premier, préfigurant en
cela le romantisme musical. Le grand moment de ce concerto, qui est aussi l’un
des moments les plus sublimes de l’histoire de la musique, se situe dans la
reprise qui suit l’exposé de la cadence du mouvement initial, avec ces accords
en creux du piano et les réponds des timbales avant que l’orchestre entier se
joigne au soliste. L’interprétation qu’ont donnée François-Frédéric Guy et
l’Orchestre de Chambre de Paris de ce chef-d’œuvre est d’un équilibre et d’un
souffle qui tient de l’épique, exaltant un onirisme et une noblesse saisissant,
le tout avec une autorité naturelle et une fluidité déconcertante.
Le bombardement de Vienne par la Grande Armée le 11 mai 1809. Photo : DR
Concerto pour piano et orchestre n° 5 « l’Empereur »
C’est naturellement sur le Concerto n° 5 en mi bémol majeur op. 73,
dit « l’Empereur », que
François-Frédéric Guy et l’Orchestre de Chambre de Paris ont conclu cette
intégrale des concertos pour piano de Beethoven. Cette partition a été
entreprise en 1808, au moment où Napoléon Ier préparait la campagne
d’Autriche. Sa genèse a été interrompue par les bombardements de Vienne et par
l’occupation de la capitale Habsbourg par la Grande Armée le 12 mai 1809. « Nous
avons durant ce laps de temps vécu dans une gêne opprimante, écrit Beethoven à
l’éditeur Breitkof & Härtel le 26 juillet 1809. Le cours des événements a
eu chez moi dans l’ensemble sa
répercussion physique et morale. Je ne parviens même pas à jouir encore de
cette vie à la campagne qui m’est si indispensable. […] Quelle vie dévastatrice
et épuisante autour de moi : rien que tambours, canons, misère humaine en
tout genre. » Pendant cette période, il est rapporté que Beethoven était
parfois pris de fièvre et s’emportait violemment contre Napoléon et le
Français. Il aurait même un jour menacé du poing dans un café un officier
français en lui criant : « Si j’étais général et en savais autant sur
la stratégie que j’en connais sur le contrepoint, je vous en donnerais pour
votre argent ! » La paix de Vienne signée en octobre 1809, Beethoven
put reprendre sereinement la genèse de son cinquième concerto, parallèlement à
sa Fantaisie pour piano, chœur et
orchestre, son Quatuor à cordes
« les Harpes » et sa Sonate
« les Adieux »… Le titre de Concerto « l’Empereur » est
évidemment apocryphe, Beethoven ayant rejeté Napoléon depuis que ce dernier se
soit lui-même couronné empereur, qui avait conduit le compositeur à déchirer la
page-titre de sa Troisième Symphonie
initialement dédiée à Bonaparte (voir http://brunoserrou.blogspot.fr/2015/08/festival-berlioz-vii-nicholas-angelich.html).
Il semble que cet intitulé ait été attribué par Johann-Baptist Cramer
(1771-1858), compositeur facteur de piano et éditeur britannique élève de Muzio
Clementi d’origine allemande vivant à Londres, qui voulut ainsi signifier la
grandeur de l’ultime concerto pour piano de Beethoven en précisant qu’il est
« l’empereur des concertos ». Car, profondément républicain, il est
impossible que Beethoven ait songé dédier son concerto à un empereur, serait-ce
l’Autrichien ou le Russe, surtout le second, despote obscurantiste et
esclavagiste. Le concerto sera créé le 28 novembre 1811 non pas par Beethoven,
trop sourd à l’époque pour le jouer, mais par son élève Friedrich Schneider
avec l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig dirigé par Johann Philipp Christian
Schultz - l’orchestration est la même que les deux précédents concertos.
Comme Cramer l’a perçu, le Cinquième Concerto de Beethoven est de
dimension inusitée jusqu’alors, et ne sera surpassée en longueur et en
dimension symphonique que par les deux concertos pour piano de Johannes Brahms
puis par celui de Ferruccio Busoni pour piano, chœur d’hommes et orchestre. Le
premier mouvement est à lui seul un concerto entier, qui frôle les six cents
mesures ouvertes sur un unique accord accentué de l’orchestre qui s’efface
immédiatement pour laisser le piano s’exprimer seul pour exposer une cadence extraordinairement
virtuose en trois sections séparées par des tutti de l’orchestre, qui attendra
d’exposer le thème principal de l’Allegro
dans l’exposition de cent mesures qui suit. Beethoven englobe la courte cadence
dans la réexposition qu’il accompagne en partie de l’orchestre, ce qui exclut
toute velléité discrétionnaire du soliste. L’Adagio central est un chant d’une sérénité accomplie, une
tendre méditation dans laquelle le piano se fond à l’orchestre. L’élégant et
allègre Rondo finale, entonné attaca après quelques accords de
transitions sur une tenue de cors, se distingue par sa verve enjouée, son
humour et sa grâce. Dans ce mouvement particulièrement dansant, le piano le
dispute en virtuosité, en chant et en puissance à l’orchestre, dont l’écriture
est particulièrement dense et jubilatoire, avec ses solos brillants et
somptueusement colorés. François-Frédéric Guy a magnifié ces pages grandioses
de son chant alternant délicatesse et vigueur servis par un touché aérien et
d’une infinie variété, comme si le pianiste improvisait sa partie, semblant
ainsi devenir Beethoven en personne, tandis que l’Orchestre de Chambre de Paris
tombait littéralement sous le charme conquérant du compositeur-même.
François-Frédéric Guy remercie Deborah Nemtanu, violon solo super soliste de l'Orchestre de Chambre de Paris. Photo : (c) Bruno Serrou
Rayonnant et heureux de ce pari
réussi, François-Frédéric Guy a répondu à l’attente d’un public qui s’est avéré
concentré et attentif à ne pas briser la magie de la soirée quatre heures
durant, en lui offrant le finale de la Sonate « Pathétique » qu’il
a joué comme s’il entendait se lancer dans une nouvelle intégrale, cette fois
des trente-deux Sonates pour piano… Mais il a pourtant fallu rompre le charme
de cette magnifique soirée d’été…
Après un tel tour de force,
François-Frédéric Guy est sorti radieux de son incroyable performance, totalement
revigoré et justement satisfait de son partenariat artistique avec les
musiciens de l’Orchestre de Chambre de Paris. Au point de vouloir à tout prix raconter
par le menu et jusqu’à plus d’heure cette aventure et en partager les exploits
avec ses amis réunis autour de lui après le concert autour d’un verre à la Taverne
Corse dans l’enceinte du chapiteau et animée par un ensemble de cabaret corse
jouant surtout des airs napolitain. Reste à espérer un nouvel enregistrement discographique
de François-Frédéric Guy de ces concertos, cette fois comme pianiste et chef,
et avec ce même orchestre.
° °
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Ce soir samedi soir, à 21h, au
Château Louis XI de La Côte-Saint-André, le Festival Berlioz reçoit l’Orchestre
National de Lyon et son directeur musical, Leonard Slatkin, dans un programme
Berlioz/Beethoven, avec la Neuvième
Symphonie de ce dernier.
Bruno Serrou
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