dimanche 19 mai 2024

Conviviale soirée de musique de chambre de l’Orchestre de Paris avec son directeur musical, Klaus Mäkelä, au violoncelle

Paris. Philharmonie / Cité de la Musique. Salle des Concerts. Vendredi 17 mai 2024 

Petteri Iivonen, Gilles Henry, Clément Batrel-Génin, Paul-Marie Kuzma, Klaus Mäkelä. Photo : (c) Bruno Serrou

Grand moment de musique de chambre ce soir à la Philharmonie de Paris / Cité de la Musique par les solistes de l’Orchestre de Paris et leur chef Klaus Mäkelä au violoncelle, renforcés par la soprano Christiane Karg (soliste de la 4 de Mahler cette semaine) et le pianiste Adam Laloum dans un merveilleux programme Franz Schubert (Adagio et Rondo concertant, le lied Le Pâtre sur le rocher version avec violoncelle se substituant à la clarinette), Robert Schumann (Six Mélodies arrangées par Aribert Reimann) et Johannes Brahms (Ophelia-Lieder arrangement Aribert. Reimann, et le Sextuor à cordes n° 1.

Adam Laloum, Christiane Karg, Klaus Mäkelä. Photo : (c) Bruno Serrou

Voilà quarante-six ans, Daniel Barenboïm, directeur musical de 1975 à 1989, créait en 1978 les concerts de musique de chambre de l’Orchestre de Paris dans lesquels il tenait le plus souvent la partie de piano. Trente-cinq ans après son départ, son lointain successeur, Klaus Mäkelä, retourne à cette tradition, se joignant à son tour à ses musiciens, cette fois au pupitre de son propre instrument, le violoncelle. Trois artistes invités néanmoins étaient cette fois de la partie, la soprano allemande Christiane Karg, qui, en milieu de semaine, avait enluminé le finale de la IVe Symphonie de Gustav Mahler (voir : http://brunoserrou.blogspot.com/2024/05/exaltante-soiree-viennoise-de.html), le premier violon de l’Orchestre de l’Opéra de Paris, Petteri Iivonen, qui depuis ce même pupitre, a lui aussi participé aux deux soirées mahlériennes, et le brillant pianiste Adam Laloum, ces musiciens se joignant à quatre membres du quintette des cordes de l’Orchestre de Paris, le violoniste Gilles Henry, chef d’attaque des seconds violons, deux tuttistes des pupitres d’altos, Clément Batrel-Génin, membre fondateur du Quatuor Onslow, et Clara Petit, qui a intégré l’Orchestre de Paris en 2022, et le violoncelliste tuttiste Paul-Marie Kuzma.

Petteri Iivonen, Gilles Henry, Christiane Karg, Clara Petit, Klaus Mäkelä. Photo : (c) Bruno Serrou

C’est un programme forgé autour de trois grands compositeurs romantiques austro-allemands, que les huit musiciens se sont produits devant une salle comble sous diverses formations. Tout d’abord deux pages de Hausmusik de Franz Schubert (1797-1828) réunies sous le titre générique Adagio et Rondo concertante D. 487 en 1816 pour pianoforte avec accompagnement de violon, alto et violoncelle. Dans cette œuvre au caractère concertant où le piano est traité tel un soliste face à un tapis de cordes, l’Adagio initial mettant en avant clavier et violon dialoguant dans un climat mélodique non dépourvu de tensions dramatiques, tandis que le piano passe au premier plan dans le Rondo au caractère plus changeant. Ainsi, Adam Laloum a-t-il pu d’entrée mettre son brio en évidence, menant en poète ce diptyque tout en discourant en parfaite convivialité avec ses trois comparses, Gilles Henry, Clément Batrel-Génin et Paul-Marie Kuzma. Christiane Karg s’est ensuite illustrée dans une suite de sept lieder de trois compositeurs différents, maître et élève allemands Robert Schumann (1810-1856) et Johannes Brahms (1833-1897), avec pour le premier le lied Herzeleid (Peine d’amour), volet liminaire des Sechs Gesänge op. 107 de 1851-1852 sur un poème de Titus Ullrich (1813-1891) suivi du cycle complet dans lequel Johannes Brahms chante la même héroïne shakespearienne que la mélodie de son protecteur, les cinq Ophelia-Lieder WoO 22 publiés trente-huit ans après la mort du compositeur, les six pages étant proposées dans des arrangements pour voix et quatuor à cordes réalisés en 1997 par le compositeur allemand Aribert Reimann (1936-2024) interprétées avec une ardente émotion par Christiane Kard discourant délicatement avec Petteri Iivonen, Gilles Henry (violons), Clara Petit (alto) et Paul-Marie Kuzma (violoncelle). Retour au Viennois Franz Schubert avec une version pour violoncelle en lieu et place de la clarinette initialement prévue par l’auteur, du triptyque Der Hirt auf dem Felsen (Le Pâtre sur le rocher) sur deux poèmes de Wilhelm Müller (1794-1827), auteur des vers de La Belle Meunière et du Voyage d’hiver, et un troisième signé du chroniqueur prussien Karl August Varnhagen von Ense (1785-1858) dans lequel Christiane Karg a conversé d’onirique façon avec Adam Laloum et Klaus Mäkelä. 

Petteri Iivonen, Klaus Mäkelä, Paul-Marie Kuzma, Clément Batrel-Génin, Gilles Henry, Clara Petit. Photo : (c) Bruno Serrou

Klaus Mäkelä allait occuper le pupitre de premier violoncelle dans un fantastique Sextuor à cordes n° 1 en si bémol majeur op. 18 (1859-1860) de Johannes Brahms aux délicieux élans printaniers sous les six archets enthousiastes des interprètes, outre Mäkelä déjà cité, Petteri Iivonen et Gilles Henry (violons), Clément Batrel-Génin et Clara Petit (altos), et Paul-Marie Kuzma (violoncelle) qui ont transporté dans un autre monde le public littéralement fasciné par le souffle épique de l’interprétation qui lui était offerte, au point que les musiciens ont repris en bis le lumineux Scherzo (Allegro molto) plus enlevé encore que dans le cours de leur première proposition, parachevant ainsi une chaleureuse et conviviale soirée de musique de chambre.

Bruno Serrou 

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