vendredi 22 novembre 2013

Mort de Bernard Parmegiani, l’un des pères de la musique électroacoustique

Né à Paris le 27 octobre 1927, le compositeur Bernard Parmegiani est mort dans la nuit du jeudi 21 au vendredi 22 novembre 2013. Il avait 86 ans.

Bernard Parmegiani (1927-2013). Photo : DR

Homme au sourire humble et austère caché par une barbe foisonnante mais toujours taillée de près, et d’une courtoisie exquise, il s’étonnait de l’importance que ses confrères accordaient à son travail et à ses réalisations. Je l’avais personnellement côtoyé fin 2005 durant une longue interview filmé dans son appartement et son studio parisien que j’avais menée dans le cadre de la série « Musique, Mémoire » que l’INA, dont dépend le GRM pour qui il travailla plus de trente ans, coproduisit dans les années 1990-2000 avec la SACEM. Il est étonnant qu’aujourd’hui, alors que l’INA lui rend hommage, les 11h30 d’entretiens ne soient pas disponibles sur le site de l’INA et n’ait pas fait l’objet d’une publication, contrairement à d’autres interviews réalisées dans le même cadre. L'INA ne m'a pas même transmis le script du film...

Claude Ballif disait de lui : « Parmi les plus doués pour cette musique-là (la musique concrète), l’un des plus musiciens est Bernard Parmegiani, qui est vraiment fait pour elle. On m’avait demandé de le faire travailler - je le vois encore, avec sa tête sévère et sa barbe : ‘’Ecoute, lui dis-je, je ne vais pas t’apprendre l’harmonie. Fais ton harmonie toi-même et tu comprendras, et, surtout, tu es fait pour la musique concrète, comme des gens sont faits pour le dessin à la plume pour la caricature.’’ Et il a fait des choses très bien. Schaeffer était content parce qu’on a pu grâce à lui avoir des débouchés. »

Bernard Parmegiani devant sa console. Photo : DR

Justement considéré comme l’un des pères de la musique électroacoustique, Bernard Parmegiani était à l’origine ingénieur du son, et mime. Il a grandi au milieu des livres d’enfants écrits par son père, de deux pianos et des cours de solfège ânonnés par les élèves de son beau-père. Il travaille le mime à l’école de Jacques Lecoq et Maximilien Decroux, et rencontre Marcel Marceau. Tous trois le sensibilisent à la pratique du geste, à la plasticité des espaces clos et ouverts. Parallèlement, il étudie les techniques du son (centre d’études radiophoniques, cinéma, radio, télévision), avant d’entrer en 1959 au Groupe de Recherches Musicales, où, sous la direction de Pierre Schaeffer, il suit le stage de musique électroacoustique et travaille notamment avec Iannis Xenakis, avant de l’intégrer en 1960. Il y restera jusqu’en 1992, année où il fonde son propre studio, qu’il baptise Fabriquasons.

En 1962, Parmegiani réalise sa première pièce personnelle, Violostries, qui fait bientôt l’objet d’une chorégraphie au Théâtre Contemporain d’Amiens. Il se voit confier le secteur Musique-Image du GRM, ce qui le conduit à côtoyer des cinéastes et à composer la musique de courts et longs métrages (films de René Lapoujade, Peter Foldès, Piotr Kamler, Vladimir Borowczyck, Pierre Kast, Jacques Baratier, Peter Kassovitz). Dans les années 1970, il réalise trois vidéos musicales, L’œil écoute, L’écran transparent, Jeux d’artifices. Ses rencontres artistiques le conduisent à travailler avec des artistes d’obédiences très diverses, notamment dans le domaine de l’improvisation et du jazz, avec des musiciens comme Jean-Louis Chautemps, Michel Portal ou Bernard Vitet, ou le groupe pop’ music londonien The Third Ear Band. Ce qui ne l’empêche pas de s’exprimer dans une centaine de pièces acousmatiques ou mixtes (instruments et bande), et de signer des génériques pour la télévision, la radio, et, en 1969, le célèbre Sonal de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle que les voyageurs du monde entier et ceux qui les accompagnaient ont pu entendre pendant trente-quatre ans, de 1971 à 2005.

 Parmi les quelques quatre-vingts œuvres qu’il a composées tout au long de sa carrière, dont vingt-sept musiques de films, quatorze ballets, douze musiques de scène, etc., citons L’Instant mobile, Capture éphémère (1967-1968), L’Enfer (1971), Pour en finir avec le pouvoir d’Orphée (1972), De Natura sonorum (1975), L’Echo du miroir (1980), La Création du monde (1984), Exercisme 1, 2 et 3 (1985-1986), Le Présent composé (1991), Entre temps (1992), Sonare (1997) et Espèce d’espace (2004). Mais son œuvre la plus connue restera le jingle qu’il a confectionné pour l’aéroport de Paris Charles-de-Gaulle Sonal.

Bruno Serrou

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