mercredi 9 juin 2021

L’Orfeo de Monteverdi et Jordi Savall font la saison 2020-2021 de l’Opéra Comique de Paris avec public

Paris. Opéra Comique. Salle Favart. Vendredi 4 juin 2021 

Claudio Monteverdi (1567-1643), L'OrfeoLuciana Mancini (Eurydice), Marc Mauillon (Orfeo). Photo : (c) Stefan Brion

Considéré comme le premier grand opéra de l’histoire, L’Orfeo de Monteverdi est le seul ouvrage présenté en présence de public à l’Opéra Comique dont il fait l’ouverture et la clôture de saison

Photo : (c) Stefan Brion

L’ouverture au public vendredi de la salle Favart a suscité un enthousiasme perceptible dès avant l’ouverture des portes de tous les participants dont les regards souriants fusaient à travers les masques. Après plus d’un an de silence forcé, à l’exception de retransmissions en streaming mais sans public, l’atmosphère était festive. Malgré la jauge réduite au tiers des capacités, tous se sont félicités de se retrouver enfin pour une vraie production lyrique live. Une renaissance donc, avec un ouvrage considéré comme la naissance de l’opéra le 27 février 1607 à la cour de Mantoue.

Photo : (c) Stefan Brion

Cet accueil particulièrement chaleureux célébrant la reprise de l’activité de la salle Favart contrastait avec la froideur clinique du plateau. Seule la musique portée par Jordi Savall et les forces de son Concert des Nations et de sa Capella Reial de Cantalunya donne sa force à cette production scéniquement dépouillée et statique, et vocalement inégale. Le chef catalan dirige de façon idiomatique cette partition dont il connaît la moindre inflexion, qu’il mène avec une énergie, une clarté, une souplesse qui instillent une expressivité qui transcende la distribution entière. L’on goûte avec d’autant plus de plaisir les immenses beautés musicales de l’œuvre que sur le plan scénique quasi rien ne se passe. La mise en scène de Pauline Bayle tient moins du théâtre que de la mise en espace en costumes sans époque précise mais plutôt réussis de Bernadette Villard et des lumières (éclat de la nature, obscurité des Enfers comme il se doit) de Pascal Noël… et à l’accessoiriste qui a su trouver les monceaux de fleurs que les figurants dispersent en figures géométriques par brassées entières, délimitant ainsi les aires de jeu sur un plateau nu. Point de direction d’acteurs, comme si pour ce qui semble être son premier spectacle lyrique, Pauline Bayle avait craint d’interférer avec les intentions des auteurs…

Photo : (c) Stefan Brion

L’univers de Monteverdi fourmille en personnages, qui donnent une vie extraordinaire à ses œuvres scéniques. Ce qui a pour corolaire le fait que les chanteurs-acteurs se doivent de donner toute leur mesure en peu de temps, leurs prestations étant resserrées. Seul Orfeo a ici la latitude de s’exprimer pleinement d'un bout à l'autre de l'oeuvre. Ainsi Marc Mauillon, qui campe un Orfeo robuste et séduisant, s’impose rapidement, à l’instar de l’excellent Pluton de Salvo Vitale, tandis que Furio Zanasi est un Apollon au timbre de bronze mais son instabilité vocale dérange. Luciana Mancini est Musique et Eurydice touchantes quoiqu’un peu raides, mais la voix est lumineuse et d’une belle musicalité, Sara Mingardo bouleverse en fragile Messagère. Les seconds rôles sont moins homogènes, déstabilisant la cohésion d’ensemble.

Bruno Serrou

Jusqu’au 10/06. Rés. : (+33) (0)1 70 23 01 31. www.opera-comique.com.

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