vendredi 22 septembre 2017

Grand-Théâtre de Genève, les aventures de Figaro en trois opéras

Genève (Suisse). Grand-Théâtre / Théâtre des Nations. Mardi 12 septembre 2017

Grand-Théâtre de Genève. Gioacchino (1792-1868), Il Barbieri di Seviglia. Photo : DR

Annonciateur des thèmes de la Révolution de 1789, le personnage de Figaro est né de l’imaginaire de Beaumarchais, qui en fit le personnage central d’une trilogie dans laquelle les compositeurs se sont plus à puiser. Le Grand-Théâtre de Genève en propose en ce moment une production venue de Cardiff

Commencé en 1772 par le Barbier de Séville, terminé en 1792 par La Mère coupable qui s’inspire du Tartuffe de Molière, la trilogie de Beaumarchais qui commence à Séville par la conquête de Rosine par le Comte Almaviva avec l’aide du barbier Figaro et se conclut vingt ans plus tard par l’exil du comte et de sa femme et le divorce de Figaro d’avec Suzanne, la trilogie est entré au théâtre lyrique dès 1782 avec Le Barbier de Séville de Giovanni Paisiello. Quatre ans plus tard, Mozart s’emparait du Mariage de Figaro avec le librettiste Lorenzo da Ponte pour composer son chef-d’œuvre Les Noces de Figaro, tandis que Rossini reprend en 1816 Le Barbier de Séville pour en faire son opéra le plus célèbre. Seule La Mère coupable est négligé, sans doute à cause de son sujet, qui devra attendre la libération des mœurs, Darius Milhaud mettant la pièce en musique en 1966.

Grand Théâtre de Genève, Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), Le Nozze di Figaro. Photo : DR

Si la trilogie présentée à Genève a choisi le Barbier de Rossini et les Noces de Mozart, ce n’est pas Milhaud qui a été retenu pour Mère courage, ni celle d’Inger Wikström (2006) ni même Thierry Pécou créé à Rouen en 2010. C’est à la compositrice russo-britannique Elena Langer (née en 1974) que l’Opéra gallois a commandé Figaro Gets a Divorce créé en février 2016, sur un livret de David Pountney amalgamant La Mère courage de Beaumarchais et son adaptation en 1936 par le dramaturge austro-hongrois Odon von Horváth (1901-1938) sous le titre Figaro divorce. Ce dernier volet du triptyque ajoute le sombre personnage du Commandant, sorte d’agent double et de milicien, ainsi qu’Angelika, fille adultérine du Comte et Barberine, et son amoureux, Serafin, fils adultérin de de la Comtesse et Chérubin. La partition de Langer à la riche orchestration qui inclut piano et accordéon, tient autant de Britten que de Puccini et de Berg, du jazz et du tango, tandis que le rôle de Chérubin devient contre-ténor.

Grand-Théâtre de Genève, Elena Langer (née en 1974), Figaro Gets a Divorce. Photo : DR

Donné dans l’ordre des pièces originelles, chaque opéra est confié à une équipe artistique différente. Seul point commun, la scénographie de Ralph Koltaï et les costumes de Sue Blane. Pour unifier le cycle, les trois opéras se déroulent dans les mêmes décors, tandis que la costumière s’est pliée aux désirs des trois metteurs en scène. Sam Brown signe une mise en scène foutraque au premier acte et plus claire au second. La distribution, inégale, est animée par Jonathan Nott, que l’on n’attendait pas ici, et son Orchestre de la Suisse romande, qui mettent littéralement le feu à ce Barbier. Dans les Noces, la troupe est sans faille. Ildebrando D’Arcangelo est un Comte époustouflant à qui le Figaro de Guido Loconsolo tient crânement tête, Nicole Cabell, Regula Mühlemann, Avery Amereau, Monica Bacelli, Seraina Perrenoud  sont toute de charme et de caractère, le chef Marko Letonja est à la tête d’un orchestre d’une cohésion saisissante, tandis que la mise en scène de Tobias Richter est mue par une véritable direction d’acteur. L’équipe de chanteurs réunie pour Figaro Gets a Divorce est tout aussi convaincante, avec entre autres le Comte altier et brutal de Mark Stone, la Suzanne ardente de Marie Arnet, l’insolence du Chérubin d’Andrew Watts, l’impressionnant Major d’Alan Oke, tandis que Justin Brown et le Basel Sinfonietta donnent éclat et fluidité à l’orchestration de Langer.


Bruno Serrou

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