lundi 9 novembre 2015

CD : Concertos pour piano de Ravel et Schmitt par Vincent Larderet, Daniel Kawka et l'Orchestre OSE


Voilà un disque remarquable qui invite à la découverte. Deux des plus célèbres concertos pour piano du XXe siècle français, encadrant une œuvre du même genre et de la même époque enregistrée ici pour la première fois, le tout joué par des interprètes français, un jeune pianiste à la personnalité et au talent déjà bien affirmés, et un orchestre plus jeune encore dont c’est le premier disque, dirigé par un chef qui l’a fondé surtout connu pour son talent dont il fait bénéficier la création contemporaine la plus pointue…

Vincent Larderet, Daniel Kawka et l'Orchestre Symphonique OSE en scéance d'enregistrement à Grenoble. Photo : DR

Si l’on ne présente plus les deux Concertos de Maurice Ravel (1875-1937), celui en ré majeur connu sous le nom de Concerto pour la main gauche (1929) précédant de deux ans celui en sol majeur, enregistré ici avec les effectifs initialement prévus par son auteur (50-60 musiciens), il n’en est pas de même pour celui de Florent Schmitt (1870-1958), J’entends dans le lointain…, poème symphonique déployé en un unique mouvement d’à peine plus d’une dizaine de minutes. Composé en 1929, ce concerto illustre un vers du premier des six Chants de Maldoror du comte de Lautréamont, « J’entends dans le lointain des cris prolongés de la douleur la plus poignante ». Daniel Kawka offre de cette page où Schmitt rend hommage aux victimes de la Première Guerre mondiale une lecture claire et intensément douloureuse, au diapason avec la violence, l’ardeur déchirante que Vincent Larderet donne à entendre de cette partition d’une exigence incroyablement virtuose que le compositeur n’a en rien simplifiée dans la version avec orchestre d’une œuvre originellement conçue pour piano seul.

Vincent Larderet. Photo : DR

Vincent Larderet a déjà livré son intégrale de l’œuvre pour piano seul de Maurice Ravel ainsi que de celle de Florent Schmitt, chez le même éditeur allemand. C’est dire combien le musicien est familier de l’univers de ces deux compositeurs français qui se sont côtoyés, le second ayant vécu plus longtemps que le premier, hélas me permets-je d’écrire, tant il s’est mal comporté dans les années 1939-1944. Doué d’une technique envoûtante qui lui permet d’exalter des sonorités d’une richesse, d’une variété et d’une amplitude infinies, Vincent Larderet donne des interprétations hallucinantes de ces œuvres, à la fois limpides, aérées et extraordinairement dramatiques.


Daniel Kawka et l’Orchestre Symphonique OSE que le chef a créé en 2011 en région Rhône-Alpes et qu’il a placé sous le signe de l’audace (de ce fait, OSE est à prononcer osé), donnent des trois œuvres réunies une interprétation au cordeau, d’une grande vélocité, colorée, singulièrement ciselée et dramatique à souhait. Soutenu par des musiciens qu’il a choisis lui-même, le chef français s’investit sans restriction dans cette musique, comme il l’a fait pour Richard Wagner en 2013 à Dijon dans un Ring malheureusement tronqué à outrance et charcuté par Brice Pauset, donne à l’ensemble cohésion, souplesse, rigueur et précision, tandis que l’orchestre atteste de sa virtuosité et d’une formidable fluidité.

Bruno Serrou

1 CD M. Ravel, Concertos pour piano, F. Schmitt, J’entends dans le lointain… Vincent Larderet (piano), Orchestre Symphonique OSE, Daniel Kawka (direction). Enregistré Auditorium Olivier Messiaen de Grenoble en février 2015. 53mn 04s. Ars Production Schumacher DSD 38178 (UVM Distribution)

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