jeudi 20 février 2014

Mark André, invité du Festival Présences de Radio France 2014, porte un regard éclairant sur la vie musicale entre Berlin et Paris

Mark André (né en 1964). Photo : SWR

« L’Allemagne a une relation différente de la France avec l’affect, la foi en Dieu, l’exigence réflexive, ce qui permet de ne pas passer pour simplet. Ce qui, pour moi croyant de confession protestante, est la question centrale. » Français, le compositeur Mark André ne voit pas de divergences fondamentales entre l’Allemagne et la France musicales d’aujourd’hui. « Je ne sens pas d’antagonismes entre ces pays autre qu’une relation plus saine en Allemagne entre les esthétiques. Elle est liée au centralisme français jusque dans l’enseignement supérieur de la musique, limité à deux conservatoires nationaux, alors qu’en Allemagne les centres d’enseignement sont multiples. »

Mark André, compositeur des plus doués de sa génération, est la parfaite illustration du cycle Paris-Berlin du 24e festival Présences que Radio France consacre à la création musicale d’aujourd’hui (1). Né dans une famille franco-allemande le 10 mai 1964 à Paris, où ses parents travaillaient aux Studios Eclair, André fait ses études au Conservatoire de Paris avec Claude Ballif et Gérard Grisey. En 1993, il reçoit une bourse du ministère des Affaires étrangères qui le conduit à étudier à Stuttgart avec Helmut Lachenmann dont il devient un proche. Parallèlement, il achève ses études de musicologie à l’Ecole normale supérieure de Paris et au Centre d’études supérieures de la Renaissance à Tours. Compositeur en résidence à l’Akademie Schloss Solitude de Stuttgart, puis à la Radio de Freiburg et Baden-Baden et à l’Opéra de Francfort, il est pensionnaire à la Villa Médicis à Rome, enfin en résidence à Berlin, où il vit désormais. Après avoir enseigné au Conservatoire de Strasbourg, il est professeur de composition en Allemagne. « En France, les grands compositeurs sont essentiellement à Paris, tandis qu’en Allemagne, ils sont partout, constate André. György Ligeti était à Hambourg, Hans Werner Henze à Cologne, Helmut Lachenmann est à Stuttgart, Wolfgang Rihm à Karlsruhe, Jorg Widmann à Freiburg, Ernö Poppe à Berlin, etc. Pour ma part, j’enseigne à Dresde et Francfort. Les Français ne vont pas étudier en Allemagne. Mes élève sont allemands, bien sûr, mais aussi japonais, canadiens, états-uniens. En France, les milieux musicaux comprennent mal mon éloignement, et je suis plus ou moins considéré comme un traître. » S’il dit ne plus être au fait de ce qui se passe en France, André n’en admire pas moins des compositeurs comme Gérard Pesson, Frédéric Durieux, Bruno Mantovani. « La présence de l’Allemand Matthias Pintscher à la tête de l’Ensemble Intercontemporain à Paris est prometteur, se félicite André. Nous nous fréquentons depuis longtemps, et nous avons plusieurs projets à Paris ensemble. »

Le 2 mars 2014, son opéra Wunderzaichen sur un livret de Patrick Hahn adapté du Nouveau Testament est créé à l’Opéra de Stuttgart dans une production dirigée par Sylvain Cambreling et mise en scène par Jossi Wieler et Sergio Morabito.

Bruno Serrou
1) Du 13 au 25 février 2014


[Article paru dans le quotidien La Croix daté samedi 15, dimanche 16 février 2014]

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