lundi 9 janvier 2023

CD : L'onirique et délicat Robert Schumann du pianiste Fabrizio Chiovetta

« A mon avis, disait de Fabrizio Chiovetta son maître Paul Badura-Skoda, il est l’un des plus grands pianistes de sa génération. Je l’admire pour sa versatilité à jouer la musique de trois siècles. »

Né à Genève le 12 septembre 1976 à Genève, de nationalité suisse, se destinant tout d’abord aux mathématiques à l’Université de sa ville natale, avant de se tourner vers la musicologie et de songer à se tourner vers un carrière de concertiste et de devenir le disciple préféré de Paul Badura-Skoda, lauréat des concours Orpheus de Zurich, New Talents en Italie et Web Concert Hall aux Etats-Unis, éminent interprète de l’œuvre pour piano de Tristan Murail, improvisateur et accordéoniste, il aime à se produire avec des musiciens de tous les horizons. Il enseigne le piano à la Haute école de musique de Genève dont il avait été l’élève.

Photo : DR

Après un CD paru en 2020 chez le même éditeur consacré aux trois dernières sonates de Beethoven, il revient à Robert Schumann dont il avait enregistré la musique pour clarinette avec celle de Clara Schumann avec Patrick Messina, CD publié en 2017, huit ans après avoir gravé les Kreisleriana chez Palexa, avec Waldszenen, Geistervariationen, trois époques de la vie créatrice de Schumann, il propose son troisième disque Schumann, de toute évidence son compositeur de prédilection.

Cette fois, pour son retour au compositeur rhénan, le pianiste italo-suisse se concentre sur les seules années 1830, période difficile pour l’homme-Schumann mais particulièrement prolifique pour le compositeur. Fabrizio Chiovetta a choisi trois d’entre ces œuvres, qui concentrent à elles seules la multiplicité des aspects du style poétique du compositeur : un Schumann libre et passionné dans la Fantaisie en ut majeur Op. 17 dédiée à Franz Liszt, lyrique et intimiste dans l’Arabesque en ut majeur Op. 18, pur et tendre dans les Kinderszenen Op. 15 où, après avoir évoqué jeux, caprices et ébats de l’enfance, le poète finit par s’exprimer totalement. S’ajoute à cet ensemble une page Sans titre extraite de l’Album pour la Jeunesse Op. 68/30 de 1848, qui tient de la même veine d’inspiration que les Scènes d’enfant mais cette fois destinée aux adultes.  

Sous les doigts de Fabrizio Chiovetta la musique de Robert Schumann s’éclaire de l’intérieur par la grâce d’une sensibilité exceptionnelle. Le pianiste a une façon peu ordinaire de saisir l’esprit de ces pages, notamment les plus spirituelles et oniriques, restituant avec tact un Schumann sobre et d’une expressivité à la fois profonde, tendre, délicate, par le biais d'un touché limpide qui met remarquablement en valeur la fluidité de la narration, aussi poétiquement chantante qu’un lied schumannien. La moindre modulation, des plus délicates aux plus abruptes, la plus petite inflexion, les formes les plus fantasques sont saisies avec une acuité extrême, Schumann et Chiovetta semblant faits du même moule sous toutes les facettes de leurs personnalités, de la tendresse la plus introspective à la folie la plus insolite.

Bruno Serrou

1CD Aparte AP 305 (Little Tribeca). Durée : 58mn 25s. Enregistré à Tobbiaco (Italie, ex-Toblach), 5-7 mars 2022 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire