Hector Berlioz (1803-1869), Benvenuto Cellini. Production de Therry Gilliam. Photo : (c) Opéra national de Paris
Absent de l’Opéra de Paris depuis 1993, Benvenuto
Cellini d'Hector Berlioz retrouve l'Opéra Bastille dans une
production venue de Londres un peu tape à l’œil portée par le ténor américain
John Osborn
Hector Berlioz (1803-1869), Benvenuto Cellini. Production de Therry Gilliam. Photo : (c) Mathias Baus
Dans Benvenuto Cellini, c’est la vie de Berlioz qui est en jeu. En
effet, à travers la figure de l’orfèvre et sculpteur florentin de la
Renaissance, le compositeur français trouve son miroir d’artiste maudit. Après
avoir passé 15 mois en Italie d’où il ramena nombre d’inspirations, il choisit pour
son premier opéra un sujet italien, tiré de l’autobiographie du « bandit
de génie ». Avec la participation de ses librettistes, Léon de Wailly et
Henri Auguste Barbier, Berlioz prend quelque liberté, déplaçant l’action, qui
se termine sur la fonte de la statue Percée, de Florence à Rome. Composé en
1834-1838, l’ouvrage sera créé dans son intégralité en janvier 1839 à l’Opéra
de Paris après moult péripéties. L’Opéra de Paris reprend la pièce 25 ans après
la production de Denis Krief et Myung-Whun Chung.
Hector Berlioz (1803-1869), Benvenuto Cellini. Production de Therry Gilliam. Photo : (c) Opéra national de Paris
Benvenuto Cellini fait son retour à Bastille dans une mise en scène
et une scénographie de Terry Gilliam créées à l’English National Opera de
Londres en juin 2014. Sur le plateau, un gigantesque capharnaüm, qui nuit
quelque peu à l’écoute de la musique tant les mouvements de scène sont bruyants
et font perdre le fil de l’action, particulièrement dans le premier acte avec
acrobates, contorsionnistes, jongleurs, défilés de toutes sortes. Il faut néanmoins
convenir que ce fratras de cirque plait au public, tant les yeux sont sollicités par le flamboiement
de la scénographie, au détriment de la musique, qui ne touche personne tans le
regard prend le pas sur l’ouïe. Quant à ceux qui y prêtent attention, ils ne
comprennent pas pourquoi, dans la fosse, Philippe Jordan, qui a choisi un mix
des nombreuses versions de la partition de Berlioz, accepte que la part
musicale, qu’il dirige pesamment et de façon atone, soit écrasée par les éclats
de la scénographie. La distribution a quelques faiblesses, notablement Maurizio
Muraro, Balducci à la voix éraillée, mais Pretty Yende, sa fille Teresa aimée
de Cellini, séduit par sa vaillance, et Michèle Losier campe un Ascanio
juvénile et ardent.
Hector Berlioz (1803-1869), Benvenuto Cellini. Production de Therry Gilliam. Photo : (c) Agathe Poupeney/Opéra national de Paris
Le spectacle repose pour l’essentiel
sur les chœurs de l’Opéra de Paris et sur les épaules du ténor américain John Osborn.
Avec son legato d’une longueur infinie s’appuyant sur une ample respiration,
son phrasé d’une rare perfection, son timbre lumineux, son français irréprochable,
sa connaissance du rôle, qu’il conçoit sur le mode du bel canto, Osborn rend
justice à cet ouvrage mésestimé. « Il y a deux airs de bel canto absolu, note
le ténor : La gloire était ma seule
idole et Sur les monts les plus
sauvages, ce dernier empreint de chant wagnérien. Il y a aussi de l’opéra-comique,
comme Ma dague en main, protégé par la
nuit. Il s’y trouve aussi l’opéra héroïque. Cette œuvre est d’une
flexibilité typique à l’opéra français. »
Bruno Serrou
Article paru dans le quotidien La Croix daté jeudi 22 mars 2018
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