samedi 9 juillet 2016

L’Opéra de Paris reprend le clinquant Aïda de Verdi d’Olivier Py avec une distribution plus satisfaisante que lors de sa première en 2013

Paris. Opéra de Paris-Bastille. Jeudi 7 juillet 2016
Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris

Retour à l’Opéra de Paris-Bastille trois ans après sa première présentation d’une production qui suscita en octobre 2013 de violentes réactions de rejet, l’Aïda de Giuseppe Verdi selon Olivier Py passe cette fois sans provoquer de réaction particulière, du moins jeudi, trois semaines après la première représentation, elle aussi conspuée. Ses costumes mêlant troisième Empire (pour les Egyptiens/Autrichien), treillis militaires contemporains et habits informes (pour les Ethiopiens/Italiens) et décors amovibles aux ors miroitant lustrés de près aveuglant le spectateur durant leur changement de position, rendent cette production clinquante, sans pour autant porter atteinte à la lisibilité de l’intrigue.

Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris

Je ne reviendrai donc pas sur les qualités et sur les défauts de cette production longuement présentée à l’occasion de son entrée sur la scène de l’Opéra Bastille en 2013 sur ce blog (voir ici : http://brunoserrou.blogspot.fr/2013/10/une-aida-toute-en-or-suscite-un.html). En revanche, la distribution a complètement changé et s’avère beaucoup plus convaincante que la précédente. A tel point d’ailleurs que la direction d’acteur se révèle plus efficace qu’antan, les chanteurs étant plus adaptés à leurs rôles que leurs prédécesseurs. Après un premier air difficile à surmonter, le célèbre « O céleste Aïda », le ténor letton Aleksandrs Antonenko est un Radamès plutôt rustique, mais le timbre est de bronze, sombre et opulent, la voix d’airain. La soprano ukrainienne Liudmyla Monastyrska est une Aïda d’une aisance vocale impressionnante, avec des aigus éclatants, mais son personnage est distant, sans réel consistance, tandis la diction est aléatoire. La mezzo-soprano italienne Daniela Barcellona est une Amnéris solide, aussi émouvante que tranchante. Continuellement vêtu de pompeux habits sacerdotaux, la basse coréenne Kwangchul Youn est un Ramfis à la voix chevrotante. Timbre somptueux aux harmoniques florissantes, le baryton ukrainien Vitaliy Bilyy propose en Amonasro un père abusif mais humain.

Photo : (c) Guergana Damianova / Opéra national de Paris

Succédant à Philippe Jordan au pupitre de cette Aïda, fidèle invité de l’Opéra de Paris dans le répertoire romantique italien, le chef israélien Daniel Oren se délecte des somptueuses sonorités de l’Orchestre de l’Opéra de Paris qu’il applaudit à chaque fin d’acte. Sa direction est précise et lyrique, mais manque de nuances. Il tire néanmoins de la remarquable phalange parisienne un modelé lustré au cordeau, exalté par des tensions dramatiques, malgré un duo final manquant de tendresse et de poésie immatérielle il est vrai difficile à atteindre. Les fanfares de la scène du triomphe ne sont plus à l’arrière-plan, résonnant depuis le fond du plateau à travers des haut-parleurs, contrairement à 2013, mais intégrés à la scénographie, ce qui n’affecte plus l’efficacité sonore de ce passage trop souvent dénaturé dans les Aïda de plein-air. Le Chœur de l’Opéra est quant à lui parfaitement en place et son nuancier est d’une richesse impressionnante.

Bruno Serrou

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