Paris. Philharmonie. Salle Pierre Boulez. Mardi 21 février 2023
Paavo Järvi, Lisa Batiashvili, Royal Concertgebouworkest Amsterdam. Photo : (c) Bruno Serrou
Les événements à ne rater sous aucun prétexte ne cessent de s’accumuler à
la Philharmonie de Paris. Le concert de ce troisième mardi de février 2023 en
est la démonstration, avec l’extraordinaire prestation du Royal Concertgebouworkest
Amsterdam dirigé avec élégance et onirisme par Paavo Järvi, avec en soliste la
prodigieuse Lisa Batiashvili dans un Concerto
pour violon et orchestre en ré majeur op. 61 de Beethoven d’une beauté
stupéfiante. Cette merveilleuse violoniste possède un son extraordinaire, d’une
chaleur, d’une variété de couleurs phénoménales, des timbres épanouis, son
archet est plein, délié, d’une précision, d’une légèreté, d’une ampleur
expressive et de nuances à tomber à la renverse. À noter qu’elle a opté pour la
cadence du compositeur russe Alfred Schnittke (1934-1998), se projetant ainsi
dans la seconde partie de la soirée… Il convient de saluer les sublimes
dialogues de la violoniste géorgienne avec l’orchestre et ses solistes,
particulièrement basson (Andrea Cellacchi), hautbois (Ivan Podyomov) solos, timbales (Tomohiro Ando). En bis, Lisa
Batiashvili a opté pour un partage avec les cordes de la phalange batave en
tenant à elle seule la place des premiers violons dans un adagio de Suite de Jean-Sébastien
Bach d’une brûlante luminosité.
Lisa Batiashvili, Paavo Järvi, Royal Concertgebouworkest Amsterdam. Photo : (c) Bruno Serrou
L’orchestre hollandais a donné de la Symphonie
n° 5 en si bémol majeur op. 100 de Serge Prokofiev une interprétation
virevoltante, épique, brillamment contrastée, avec une rythmique envoûtante
d’une précision diabolique sous la direction enthousiaste de Paavo Järvi. En
bis une Valse triste de Jean Sibelius émouvante. Soirée à marquer d’une pierre
blanche. Symphonie dite « de guerre, cette cinquième torrentielle, asphyxiante,
tétanisante, a sonné aux oreilles d’un certain nombre d’auditeurs de façon alarmante,
plongeant au cœur des terribles événements qui se déroulent depuis une année en Ukraine, avec l’agresseur
russe qui ne cessent d’évoquer la Seconde Guerre mondiale, les nazis, Staline
et autres « sacrifices du peuple russe » pour détruire l’Ukraine,
massacrer des civils, déporter des enfants, tandis que venaient de se répondre
à distance dans la journée les présidents russe et étatsunien quant aux
objectifs de guerre…
Paavo Järvi, Royal Concertgebouworkest Amsterdam. Photoi : (c) Bruno Serrou
Fort heureusement, Lisa Batiashvili, avant de jouer Bach, a rendu hommage à
toutes les victimes de l’agression russe, tandis que la Valse triste de Sibelius
a l’issue de la symphonie de Prokofiev offerte en bis par le chef estonien et l’orchestre
hollandais a tenu de la même pensée.
Bruno Serrou
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