Aloys Kontarsky (1931-2017). Photo : DR
Le pianiste Aloys Kontarsky est
mort à l’âge de 86 ans. Dans le salon de son domicile, où étaient installés deux grands Steinway de concert, il enseignait après qu’un accident
vasculaire cérébral l’ait laissé paralysé du côté droit en 1983. Si la
communication n’était pas chose aisée, il pouvait exprimer sa pédagogie en
produisant avec sa main gauche autant de puissance, de couleurs et de nuances
que nombre de pianistes avec les deux mains. Le socle de son enseignement consistait
à dire à ses élèves « Donnez tout ce que vous avez ! » Conseil
qu’il s’est appliqué à lui-même dans l’ensemble de sa carrière et au-delà, à l’instar
de ses contemporains britannique David Tudor et français Claude Helffer. Que ce
soit l’enregistrement de la Klavierstücke
X de Karlheinz Stockhausen qu’il avait créée un mois plus tôt après l’avoir
travaillée en quelques jours, ou pour le répertoire classique à quatre mains (Schubert,
Brahms, Debussy, Ravel, Stravinsky, Bartók) avec son frère Alfons (1932-2010),
il aura représenté jusqu’à la fin de sa vie le summum du piano pour beaucoup de
pianistes de plusieurs générations.
Alfons et Aloys Kontarsky. Photo : DR
Né à Iserlohn
(Rhénanie-du-Nord-Westphalie) le 14 mai 1931, il avait étudié le piano à la
Hochschule de Cologne de 1953 à 1955 avec Else Schmitz-Gohr, nièce du grand
chef d’orchestre Arthur Nikisch, et la musique de chambre avec le violoncelliste
néerlandais Maurits Frank, élève de Pau Casals. Cette même année 1955, il forme
un duo pour piano avec son frère Alfons, son cadet de dix-sept mois, et
remporte avec lui le Premier Prix du Concours international de la Radio
bavaroise, à Munich. Après s’être perfectionnés à Hambourg auprès d’Eduard
Erdmann, ils deviennent rapidement célèbres à Darmstadt durant les cours d’été,
par leur interprétation de la musique nouvelle. Ce qui ne les empêche pas de s’attacher
au répertoire classique et romantique, enregistrant les intégrales des œuvres
pour deux pianos et piano à quatre mains de Claude Debussy et Maurice Ravel. En
1960, Aloys Kontarsky est nommé professeur à Darmstadt, tout en menant une
carrière de soliste. Il crée des œuvres pour piano seul et de musique de
chambre, notamment avec le violoncelliste suédois Siegfried Palm, de Luciano
Berio, Earl Brown, Sylvano Bussotti, Mauricio Kagel, Bruno Maderna, Karlheinz
Stockhausen dont il a enregistré les onze Klavierstücke
et qu’il a été le premier à donner en concert dans leur intégralité, à
Darmstadt en 1966, et Bernd Alois Zimmermann. Avec son frère, il crée ou reçoit
en dédicace un nombre important de partitions nouvelles de Pierre Boulez (1er
livre des Structures), György Ligeti,
Stockhausen, Zimmermann, etc.
La grande majorité des
enregistrements d’Aloys Kontarsky en tant soliste, en duo avec Siegfried Palm,
le flûtiste Severino Gazzelloni, et surtout avec son frère Alfons Kontarsky, ou
aussi au sein d’un ensemble (Momente
de Stockhausen) est disponible chez Deutsche Grammophon (DG).
Bruno Serrou
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