Elliott Carter (1908-2012) au piano en 1989. Photo : DR
Elliott Carter (1908-2012), Quatuor à cordes n° 5
1 Introduction
2 Giocoso
3 Interlude I
4 Lento espressivo
5 Interlude II
6 Presto scorrevole
7 Interlude III
8 Allegro energico
9 Interlude IV
10 Adagio sereno
11 Interlude V
12 Capriccioso
(Durée : 20 minutes environ)
Né à New York le 11 décembre 1908, Elliott Carter est
aujourd’hui l’aîné des compositeurs vivants* de renom. Dès l’école primaire,
Carter prend des leçons de piano, sans éprouver de plaisir particulier à la
musique. Adolescent, il se tourne vers le théâtre et intègre rapidement le
petit cercle des intellectuels new-yorkais. Alors même qu’il doit lutter contre
l’incompréhension des siens, son père le destinant à sa succession à la tête de
son entreprise d’exportation de dentelles, sa vocation de musicien est
encouragée par Charles Ives. A l’Université de Harvard, il est l’élève de
Walter Piston, puis il se rend à Paris pour étudier avec Nadia Boulanger dont
il est trois ans l’élève à l’Ecole normale de musique. De retour à New
York, où il enseignera à son tour, il fait son miel des diverses esthétiques
collectées en Europe et aux Etats-Unis, sa musique étant autant redevable à
Debussy, Varèse, Schönberg, Ives, Cowell, Bartok et Webern qu’à Bach,
Scriabine, Stravinski et Milhaud.
Elliott Carter chez lui, dans son appartement de Greenwich Village, à 101 ans. Photo : DR
C’est dans le genre quatuor à cordes que Carter a le plus
investi pour élaborer son style le plus radical et complexe. De ce fait, les
cinq quatuors se situent dans sa production dans la ligne des grands
chefs-d’œuvre de Beethoven, Bartok ou Schönberg, et, tout comme eux, non
seulement ils incarnent une pensée mais marquent un jalon dans la création du
compositeur. A la série des quatre quatuors composés entre 1951 et 1978, Carter
donnait en 1995 un cinquième élément, qui allait être suivi deux ans plus tard
par un Quintette pour piano et quatuor à cordes.
Le Quatuor Arditti dans sa formation à l'époque de la création du Quatuor à cordes n° 5 d'Elliott Carter. Photo : DR
Commande conjointe de Singel d’Anvers, du Festival
d’Automne à Paris et du Lincoln Center de New York, composé en 1993 et dédié au
Quatuor Arditti, qui l’a créé à Anvers le 19 septembre 1995, le Cinquième Quatuor à cordes de Carter est
constitué de six mouvements, chacun précédé d’une introduction ou d’un
interlude. L’ensemble est développé en continu. Dans l’introduction et les
quatre premiers interludes, Carter use de l’aléatoire, mais un aléatoire noté
de façon particulièrement précise, de telle sorte que les musiciens semblent
reprendre des bribes de mouvements qu’ils viennent de jouer ou qu’ils vont
jouer et qui serviront de matériaux qu’ils travailleront simultanément et
individuellement, dans des contextes et un ordre différents, comme s’ils
étaient en train de répéter. « L’un des aspects les plus fascinants des
répétitions de musique de chambre, écrit Carter dans la préface de sa
partition, lorsque d’excellents exécutants essaient des fragments de ce qu’ils
joueront plus tard ensemble, puis le jouent et s’arrêtent abruptement pour
discuter de la façon d’apporter des améliorations, est que cet exemple est très
similaire à notre expérience intérieure qui forme, ordonne, met au point,
réalise nos sentiments et nos idées puis nous en éloigne. Dans l’élaboration de
cette œuvre, le problème de la coopération humaine avec ses différents types de
sentiments et de pensées a été une considération très importante. »
Elliott Carter, Quatuor à cordes n° 5, Introduction (mesures 1-9). Photo : (c) Editions Contrechamps
Ainsi, après l’individualisme des interludes, les
musiciens du quatuor d’archets collaborent dans les six mouvements. Le premier,
« Giocoso », où le premier violon prédomine, et le quatrième,
« Allegro energico », où l’alto a la préséance, laissent apparaître
des éléments provenant des autres morceaux, alors que les quatre autres parties
sont plus homogènes, les quatre instruments jouant le plus souvent ensemble,
surtout dans les deux mouvements lents et dans le plus vif, le « Presto
scorrevole ». En outre, deux de ces mouvements usent de modes de jeu spécifiques,
l’« Adagio sereno », joué sur les seuls harmoniques, et le
« Capriccioso », en pizzicato.
BrunoSerrou
* Elliott Carter est mort à New York le 5 novembre 2012, à l'âge de 103 ans. Le texte ci-dessus a été écrit en février 2002 pour l'association Pro Quartet.
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