Annecy, mardi 21 et mercredi 22 août 2012
Depuis trois ans, Annecy accueille les grands orchestres internationaux
pour une décade musicale que seules les grandes capitales peuvent s’offrir
Voilà 43 ans, la pianiste Eliane
Richepin fondait à Annecy une académie festival. Parmi ses élèves, Pascal
Escande. « Cette femme redoutable était une merveilleuse pédagogue, se
souvient-il. Mais elle n’avait pas la langue dans sa poche, et elle finit par
se fâcher avec les édiles qui la subventionnaient. » Fort du succès du
Festival d’Auvers-sur-Oise qu’il a fondé en 1981, Escande fut appelé par son
maître qui lui proposa sa succession en 1997. Onze ans plus tard, économiquement
exsangue, il faillit mettre la clef sous la porte. C’était sans compter sur le
pianiste russe Denis Matsuev, à qui il avait offert à Auvers son premier
récital en France, qui lui présenta son compatriote mécène, l’homme
d’affaires Andreï Cheglakov, qui, par le
biais de sa Fondation AVC Charity, soutient les arts plastiques, l’édition et
la musique. En 2010, la Fondation devient le principal support du festival, qui
prend le nom d’Annecy Classic Festival qu’il dote de moyens financiers aptes à en
faire un rendez-vous mondial. La ville d’Annecy et la Haute-Savoie se rallient
au projet par une convention triennale reconductible. Souhaitant s’implanter
durablement, le mécène a demandé aux élus l’érection d’un auditorium de 1000
places pour 2015. Si la pédagogie est présente, avec un atelier vocal dirigé
par Patrick Marco et des classes de maîtres d’instruments, le festival, riche
d’un budget de 1,4 million d’euros, atteint un niveau que les Annéciens espéraient
sans y croire, avec des affiches réunissant stars et musiciens des générations montantes.
« Nous nous adressons en priorité au public local, se flatte Escande. C’est
pourquoi nous avons choisi la dernière décade d’août. Chaque soir un millier de
mélomanes du cru assistent à nos concerts. » C’est dans l’église Sainte-Bernadette
à l’acoustique adaptée aux concerts symphoniques avec son grand mur réflecteur
de sons, que se produisent cet été le Royal Philharmonic de Londres et le
Philharmonique de Saint-Pétersbourg.
Concert
d'ouverture ce mardi soir du 3e Annecy Classic Festival en l'église
Sainte-Bernadette avec le Royal Philharmonic Orchestra de Londres dirigé par Charles
Dutoit. En soliste, le pianiste russe Denis Matsuev, co-directeur artistique du
festival. Taillé comme un bûcheron, ce dernier joue Beethoven tel un bûcheron.
Jeu puissant et sans nuances, sous ses doigts d’airain le sublime Concerto n° 3 du « Grand sourd »
devient sous un concerto de Tchaïkovski, tandis que le mouvement lent est vide
de sens. Dutoit doit pousser l’orchestre à une puissance immodérée pour se
faire entendre, tout en s’avérant à l’écoute de son soliste. Ouverture de Berlioz
bien servie par Dutoit dont on connaît les affinités avec le compositeur
français. Enfin, une belle interprétation de la Symphonie « du Nouveau Monde »
d’Antonin Dvorak, bien en place, ardente et vive, à laquelle il a juste manqué
une petite touche de nostalgie. En bis, une séduisante Valse triste de Jean Sibelius.
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