Festival Ravel en Pays Basque. Saint-Jean-de-Luz, Saint-Pée-sur-Nivelle, Ciboure. Mercredi 22, jeudi 23 et vendredi 24 août 2021
Après une année blanche, le
Festival Ravel de Saint-Jean-de-Luz revient plus vigoureux que jamais, sous la
houlette de deux directeurs artistiques aux fortes complicités, Jean-François
Heisser et Bertrand Chamayou
Commençant un peu plus tôt que les années précédentes, le Festival Ravel fleurait encore bon les vacances la première semaine de l’édition 2021, Saint-Jean-de-Luz étant encore empli d’estivants, fort respectueux il fait le constater du protocole sanitaire lié au Covid-19. Après une année blanche, le festival se présente sous une forme renouvelée, plus ambitieuse que jamais. Deux pianistes profondément marqués par Ravel, par les compositeurs espagnols du XXe siècle et fortement engagés dans la création contemporaine se sont associés pour revigorer une manifestation née voilà soixante ans, Jean-François Heisser, qui dirige depuis vingt ans l’Académie Maurice Ravel, et son brillant disciple, Bertrand Chamayou.
Le nouveau Festival Ravel fusionne deux grands rendez-vous d’été du sud de la Région Nouvelle Aquitaine fondées dans les années 1960, le Festival Musique en Côte basque et l’Académie internationale Maurice Ravel créée en 1967. Heisser a succédé voilà une vingtaine d’années à la tête de l’Académie à Jean Darnel, son fondateur, qui a continué à s’occuper de Musique en Côte Basque, l’association se séparant pendant quinze ans. Les deux entités se sont réunies de nouveau en 2016, pour engendrer une seule manifestation qui déroule désormais simultanément. « Nous avons franchi une première étape en 2017, rappelle Jean-François Heisser, mais la pandémie a permis de réaliser pleinement que nous avions atteint les limites de cette coréalisation et qu’il nous fallait redéployer la voilure. Les deux entités ont été réunies en septembre 2020. Un soir de décembre 2019, j’ai eu l’idée de téléphoner à Bertrand Chamayou, qui a un fort encrage au Pays Basque, pour lui demander s’il serait intéressé d’entrer dans le processus et de travailler sans délai avec moi pour construire un nouveau projet. »
Amoureux du Pays Basque et proche de Jean-François Heisser, Bertrand Chamayou n’a pas hésité. « Toulousain, j’ai rencontré Jean-François Heisser à 13 ans alors qu’il était dans un jury au Conservatoire de Toulouse. Cette rencontre a été pour moi un déclencheur, je suis devenu son élève, je me suis présenté au CNSMDP quelques années après avoir été stagiaire à l’Académie quatre étés. Je suis entré dans sa classe au Conservatoire de Paris, et j’ai été huit ans son élève ans. Je connais très bien Saint-Jean-de-Luz, où mes parents ont une résidence de vacances, et j’ai toujours baigné dans la musique de Ravel et toutes ses connexions, d’Albeniz et Falla à Stravinski. Cet univers, qui est le même que celui d’Heisser, m’est familier. Je pensais depuis des années qu’il était regrettable que l’on ne développe pas davantage cette identité ravélienne avec toutes les ramifications qui la comportent, c’est-à-dire pas seulement Ravel, mais tout l’imaginaire que ce nom peut déployer, ses rencontres, ses goûts personnels. Quand Heisser m’a proposé de participer à son projet je n’ai pas hésité parce que je suis convaincu depuis longtemps qu’il y a ici un potentiel extraordinaire. »
Il a fallu pourvoir au manque de moyens financiers pour développer un tel projet. Riche de ses subventions régionales, départementales et municipales, s’ajoutent désormais un mécénat plus développé que jamais. Le Festival Ravel peut ainsi renforcer son implantation sur le territoire basque en diversifiant notamment ses lieux de concerts, au-delà de son traditionnel ancrage dans l’enceinte de la superbe église de Saint-Jean-de-Luz où Louis XIV épousa l’infante d’Espagne Marie-Thérèse d’Autriche en 1660. Il peut aussi désormais inviter les plus grands artistes internationaux venant du monde entier, du soliste à l’orchestre symphonique, jusque dans les villages les plus reculés, investissant des lieux patrimoniaux des plus exceptionnels du Pays Basque.
L’édition 2021 s’est ouverte sur une installation sonore de Philippe Manoury (2) qui se renouvelle à l’infini à travers des haut-parleurs disséminés dans la totalité de la Maison Louis XIV. Le premier concert a été confié au Quatuor Modigliani avec une version plus aboutie d’un spectacle chorégraphique créé à Bordeaux en mai dernier sur le Quatuor de Ravel (voir http://brunoserrou.blogspot.com/2021/05/premieres-vibrations-musicales-post.html). La Mairie de Saint-Jean-de-Luz a accueilli un récital de valses de Raynaldo Hahn, Emmanuel Chabrier et Maurice Ravel pour deux pianos par Bertrand Chamayou et Jean-François Heisser perturbé par une puissante sono de « musiques actuelles » venue du kiosque à musique planté devant la mairie. La charmante église de Saint-Pée-sur-Nivelle a résonné des timbres veloutés de l’ensemble Il Giardino Armonico dialoguant avec les sœurs Labèque jouant Mozart sur deux forte-pianos aux sonorités fluettes, tandis que Giovanni Antonini dirigeait une Symphonie n° 43 de Joseph Haydn de feu. C’est à l’issue d’un somptueux concert violoncelle-piano de Sol Gabetta et Bertrand Chamayou en l’église de Ciboure où Ravel fut baptisé, avec les deux Sonates de Mendelssohn, l’admirable Sonate de Debussy, un court intermède de Jörg Wildmann, qu’il m’a fallu quitter ce festival particulièrement accueillant et riche en propositions.
Bruno Serrou
Jusqu’au 10/09. Rens. :
05.59.47.13.00. www.festivalravel.fr.
1) Orchestre de Paris/Riccardo Chailly (Ravel) en clôture de festival, le 10/09.
2) Outre Philippe Manoury, deux autres compositeurs sont les hôtes du festival
2021, le Suisse Michael Jarrell et le Basque Ramon Lazkano